Cette semaine (30 juillet) sortait une nouvelle fois au cinéma La Mort aux trousses (North by Northwest) d’Alfred Hitchcock. Réalisé en 1958-1959, ce film extraordinaire – l’un des meilleurs du maître de suspense, avec Rear Window (Fenêtre sur cour, 1954), et Vertigo (Sueurs froides, 1958) – me rappelle immédiatement mon adolescence, et une date en particulier, le premier lundi de l’année 1995, 2 ou 3 janvier 1995. Je ne pourrais dire ce qui m’a poussé ce soir-là à enregistrer ce film sur France 3. Je ne connaissais pas le cinéma, ou si peu. Cela ne m’intéressait guère. J’étais tout orienté – déjà – sur la musique, classique.
Pourtant, je le fis, et je le regardai le lendemain, le mardi. Cependant, ce film ne me donna que du plaisir, et m’ouvrit l’appétit. L’appétit du visuel. Comment après aurais-je pu ignorer le cinéma ? Il me fallait alors voir tout Hitchcock – et heureusement, à l’époque, la TV remplissait encore un peu son rôle d’éducation, TF1 diffusait même peu de temps après La Main au collet, avec encore une fois Cary Grant, et Grace Kelly. Après Hitchcock, viendraient tout naturellement – par esprit d’escalier – les autres grands noms du cinéma hollywoodien, réalisateurs, acteurs, actrices. S’ouvrit une spirale infernale, où j’explorai Hitchcock toujours plus, mais aussi George Cukor, John Ford, Vincente Minnelli, Fritz Lang, Henry Hathaway, John Huston, Howard Hawks, Cary Grant, Gary Cooper, Erroll Flynn, James Mason, Marlon Brando, Henry Fonda, Spencer Tracy, James Stewart, John Wayne, Ava Gardner, Deborah Kerr, Rita Hayworth, Katharine Hepburn, Audrey Hepburn, etc. Sans aucun doute ai-je vu trop tôt certains films, je n’en mesurai pas la portée. Ce n’est que bien plus tard aussi, que je pris conscience que le cinéma ne se résumait pas à Hollywood. D’ailleurs, aujourd’hui, je dois rattraper encore aujourd’hui mon retard dû à cette focalisation extrême sur l’Amérique.
Nonobstant, La Mort aux trousses m’ouvrit un horizon immense, celui du cinéma. Pour moi, vingt ans plus tard, et pas moins de dix à quinze visionnages, il reste l’archétype du film parfait – du moins dans le genre du thriller, de la comédie policière ou du film d’action… Car, si j’en crois les experts, Alfred Hitchcock inventa, avec ce film, le genre du film d’action.
Il ressortait cette semaine en salles, et devant l’extrême pénurie des sorties de nouveaux films, et ma forte envie d’aller toutefois au cinéma, je choisis – sans trop hésiter – une nouvelle fois cette Mort aux trousses, que je connais presque par coeur. Ce qui continue de me fasciner dans ce film d’Hitchcock, et bien plus que dans Psychose (Psycho, 1960) ou Les Oiseaux (The Birds, 1963), c’est la perfection absolue des équilibres. Bien sûr, certaines techniques d’effets spéciaux ont vieilli – le hall de l’ONU, la reconstitution de la maison du méchant Van Damm, ou du Mont Rushmore – mais la construction du scénario, d’une rare fluidité, sans longueur, la qualité de jeu de Cary Grant et Eva Marie Saint sont incomparables – la scène d’amour dans le train est d’une rare intensité de mise en scène. Ce film se distingue par une précision méticuleuse, empreinte d’une légèreté et d’un charme authentique (entre tendresse et simplicité) que les auteurs d’aujourd’hui ont oubliés. Stanley Donen, dans Charade (avec encore Cary Grant, en 1963) et les premiers épisodes de James Bond (Sean Connery) s’en souviendront, sans aucune doute. Et puis, chez Hitchcock, il y a la musique de Bernard Herrmann, toujours aussi spectaculaire et percutante.
Quelques années que je n’avais pas vu ce film, et j’ai même découvert un petit détail auquel je n’avais jamais prêté attention… Paradoxalement, cette Mort aux trousses, qui a aujourd’hui cinquante-cinq ans, restera l’un de mes films de l’année 2014. Voilà un film qui n’a pas fini de me hanter !
Pour écouter les musiques de Bernard Herrmann, choisissez, sur Qobuz, l’album magnifique d’Esa-Pekka Salonen, enregistré en 1995.
Pour écouter la musique intégrale (si moderne) du film La Mort aux trousses d’Hitchcock, cliquez-ici.