Voici peu Nelson Freire initiait son intégrale des Concertos de Beethoven par L’Empereur. Collaboration pleine de panache et de relance avec Riccardo Chailly et l’Orchestre du Gewandhaus de Leipzig. Une fête. Leif Ove Andsnes, dialoguant avec lui-même puisqu’il se passe de chef, conclut son intégrale par L’Empereur : logique.
Du plein son, admirablement équilibré. Trop de plein son ? Andsnes joue son Empereur en classique, tempos tranquilles, accents radieux, sens mélodique affuté, phrasés posés. Tout cela respire, trace des perspectives, mais ne piaffe jamais. Dans le Finale qui doit caracoler, certains traits se boulent, conscients qu’il faudrait tout de même oser un peu de folie. Trop tard, sa lecture est versée tout entière à Apollon.
Je lui fais fête car elle clôt une entreprise magnifique, autant pour le jeu d’un piano conscient du style beethovénien et de sa place dans l’histoire – à ce titre Andsnes donne à entendre l’évolution entre le Premier Concerto et le Cinquième comme rarement une intégrale l’aura fait – construite à partir de Mozart et qui s’ouvre sur un art hors du temps.
A son Empereur un peu tranquille, Andsnes ajoute une lecture subtilement conduite de la difficile Fantaisie Chorale, œuvre hybride qui échappe souvent à ses interprètes. Il la construit avec un sens du récit, une imagination, une diversité de styles qu’on n’y avait pas entendus depuis la splendide lecture qu’en proposaient jadis Hans Richter-Haaser et Karl Böhm pour Philips. Et maintenant, si Andsnes se mesurait aux Sonates ? Il est temps.
LE DISQUE DU JOUR
Ludwig van Beethoven (1770-1827)
Concerto pour piano No. 5 en mi bémol majeur, Op. 73 « L’Empereur »
Fantaisie pour piano, choeur et orchestre en ut mineur, Op. 80 (2)
Leif Ove Andsnes, piano et direction
The Prague Philharmonic Choir (2)
Mahler Chamber Orchestra
Un album du label Sony Classical 8842058862
Photo à la une : (c) DR