Une nouvelle intégrale du piano de Bartók, cela attire fatalement l’attention. J’avoue n’avoir rien su jusqu’ici d’Andreas Bach, que le public munichois fête régulièrement. Mais dés les premières mesures de la Suite de Danses, ces phrasés si particuliers, ce clavier si plein qui ne sacrifie rien des couleurs médianes omniprésentes dans le piano de Bartók, cette technique parfaite qui refuse le brillant pour mieux servir le lyrisme du discours m’ont tiré l’oreille.
Intégrale engrangées de 2008 à 2014 – en voilà un qui prend son temps, on ne lui reprochera pas – et qui ira pour sa publication à rebours de la chronologie. Le premier volume est donc consacré aux œuvres de maturité, En plein air très nocturne, Allegro barbaro pris comme la course effrénée d’un mandarin plus merveilleux du tout, Bagatelles inquiètes et perdues, Dirges fantomatiques, tout un univers dont Andreas Bach trouve les clefs en quelque sorte de l’intérieur.
On est loin du brio de Kocsis et plus près de la manière elliptique des premières gravures de György Sandor ou du ton radical d’Andor Foldes. Il faut donc ici apprivoiser en abandonnant tout espoir d’être séduit. Le propos du pianiste est de nous emmener dans ce cœur inquiet, dans l’étrange poésie d’un univers sans rémission, où le renoncement n’est jamais loin.
Que tout cela soit trouvé dans un piano si plein, si ample et qui surtout a laissé au vestiaire les marteaux pour préférer les timbres, augure bien de la suite.
LE DISQUE DU JOUR
Béla Bartók (1881-1945)
L’Œuvre pour piano
(Intégrale)
Vol. 1 : Les œuvres de la maturité
En plein air, Dix Pièces faciles Sz. 39, 3 Burlesques, Petite Suite, 4 Dirges, 3 Études, Sonatine, Sonate, 7 Esquisses, Suite de danses, Allegro barbaro, Suite Op. 14, 14 Bagatelles, Les premiers pas au piano, Andante
Andreas Bach, piano
Un album de 3 CD du label Hänssler Classic 98042
Photo à la une : (c) DR