La Cinquième de Brahms ?

La « Cinquième Symphonie » de Brahms, voilà l’appellation cavalière dont certains affublent cette œuvre hybride, où Schönberg rendait hommage au génie progressiste de Brahms. On connaît Schönberg réduisant Mahler et bien d’autres compositeurs pour la Verein für Musikalische Privatauffürhungen, son propos n’est pas différent lorsque entre mars et septembre 1937, il décide cette fois de transcrire pour le grand orchestre – celui qu’emploie Brahms dans sa Quatrième Symphonie, plus un important pupître de percussion(s), le Quatuor avec piano Op. 25 de son aîné : mettre à l’honneur une œuvre qu’il aime en la tirant de l’oubli relatif dans laquelle elle était tombée. Ce travail de divulgation par l’extension rappelle celui entrepris sur les derniers Quatuors de Beethoven par Gustav Mahler.

La reconstruction subtile à laquelle s’est livré Schöenberg a souvent été dévoyé par des interprétations forçant le trait – un seule jusqu’à ce jour m’avait convaincue, celle d’Heinz Zender et de la Junge Deutsche Philharmonie.

Avec son orchestre de virtuoses, Marc Albrecht parvient à la quadrature du cercle : faire sans cesse entendre l’original derrière la vêture dont l’a paré Schönberg, et cela en respectant scrupuleusement les variations de tempo et de dynamique : le Finale, ébouriffant sous sa direction, éclate dans toute sa dimension hungarisante, mais ailleurs, la subtilité de la conduite, la simple beauté des colorations, les transparences des tissus orchestraux confinent à une perfection mobile, si poétique.

C’est aussi ce qui surprend dans la Musique pour l’accompagnement d’une scène de film placée en postlude : la clarté, l’évidence de la conduction dans le foisonnement, l’aspect irréel d’une fantasmagorie sonore qui décidément confirme à quel point Marc Albrecht est chez lui dans la nouvelle musique viennoise, de Mahler à Schoenberg. Une fois de plus, prise de son exceptionnelle de l’équipe Pentatone.

LE DISQUE DU JOUR

cover schönberg albrecht pentatoneJohannes Brahms
(1833-1897)
Quatuor pour piano et cordes No. 1 en sol mineur, Op. 25 (Orchestration : Arnold Schönberg)
Arnold Schönberg
(1874-1951)
Begleitungsmusik zu einer Lichtspielszene (Musique pour l’accompagnement d’une scène de film), Op. 34

Netherlands Philharmonic Orchestra
Marc Albrecht, direction

Un album du label Pentatone PTC 5186398
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Photo à la une : © 2010 Marco Borggreve