Entendre au lieu de la clarinette l’alto murmurer la phrase de lied qui ouvre les Fantaisiestücke Op. 73 de Schumann, c’est atteindre un autre horizon de cet ailleurs magique, pays de romances et de contes dont Ettore Causa explore l’univers tendre de son archet soyeux.
Quelle belle idée, tout un disque de transcriptions, étendant le répertoire si discret de l’alto. Evidemment, le romantisme de Schumann va comme un gant à cet instrument qui calque la voix humaine. Si la transcription des Fantasiestücke de Bruno Giuranna a acquis ses lettres de noblesses, celles qui suivent, de main même d’Ettore Causa, si justes, si senties, prendront le même chemin : pour l’Intermezzo de la Sonate F.A.E, les couleurs assourdies donnent une tendresse effusive, pour l’Adagio et Allegro Op. 70, le phrasé plus libre de l’alto dévoile une palette expressive que le cor suggérait à peine.
Mais ce seront les trois Romances Op. 94, lieder sans paroles désarmants, qui dans le chant des cordes s’épanouissent le plus. L’album se clôt chez Brahms, avec une transcription de la Première Sonate pour violoncelle réalisée à quatre mains par Ettore Causa et Boris Berman qui plie tout au long du programme son grand clavier au chant intime de l’alto. Limite de l’exercice – le geste ne saurait être aussi éloquent qu’au sortir de la grande caisse du violoncelle – mais avantage certains du coté de la Lyre : comme cela chante !
Adrien Boisseau et Gaspard Dehaene restent entièrement chez Schumann. Le nouveau petit génie de l’alto français, qui a rejoint le Quatuor Ebène en janvier dernier, possède un son clair, un aigu qui rêve d’un soprano, et ses notes se forment comme des mots. L’élan passionné du Rasch und mit Feuer des Fantasiestücke étreint et l’imagination des jeux de timbres, les phrasés très libres des deux cahiers de contes – et la clarinette fruitée de Pierre Génisson paraît dans l’Opus 132 – font merveille comme les trois Lieder transcrits de la voix aux quatre cordes. Disque discret, secret où le cœur de Schumann palpite.
LE DISQUE DU JOUR
Robert Schumann
(1810-1856)
Fantasiestücke, pour clarinette ou violoncelle et piano, Op. 73 (arr. pour alto)
Sonate pour violon et piano,
« F. A. E » (Frei aber einsam)
(2. Intermezzo, arr. pour alto))
Adagio et Allegro, pour cor
(ou violoncelle, violon, alto)
et piano, Op. 70
3 Romances, pour hautbois et piano, Op. 94 (arr. pour alto)
Johannes Brahms (1833-1897)
Sonate pour violoncelle et piano No. 1 en mi mineur, Op. 38 (arr. pour alto)
Ettore Causa, alto
Boris Berman, piano
Un album du label Claves 501511
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Robert Schumann
Fantasiestücke, pour clarinette ou violoncelle et piano, Op. 73 (arr. pour alto)
Märchenbilder, pour alto
et piano, Op. 113
3 Romances, pour hautbois
et piano, Op. 94 (arr. pour alto)
Märchenerzählungen,
pour clarinette, alto et piano, Op. 132
Adrien Boisseau, alto
Gaspard Dehaene, piano
Pierre Genisson, clarinette
Un album du label Oehms Classics OC1819
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Photo à la une : L’altiste Ettore Causa – Photo : (c) DR