Les Takács ont acquis aujourd’hui une sonorité débordante, aux harmoniques saturées, d’une profusion de timbres et de couleurs assez inouïe. Ils entrent dans le Quatuor de Debussy avec ce ton passionné, cette polyphonie chromatique, soulignant que l’œuvre est celle d’un jeune homme de trente ans qui écrivait parallèlement le Prélude à l’après-midi d’un faune.
Le ton passionné de leur lecture vive et pleine évite les prudences ou les gestes esthétisants encombrés d’un certain symbolisme où tant de formations tombent par confort stylistique. Pour les Takács, le Quatuor est absolument un opus de la maturité qui parle une langue fauviste, résolument tournée vers l’avenir.
Et chez Franck ? Le vaste Quintette en fa mineur que Camille Saint-Saëns et le Quatuor Marsick créèrent à la Société Nationale de Musique le 17 janvier 1880 appelle des lectures sombres et héroïques, dont le piano règle les amples progressions dramatiques. Marc-André Hamelin dès l’Introduction lui donne ce ton de symphonie élégiaque que les quatre cordes relaient avec des sonorités d’une poignante beauté.
Tout du long, un lyrisme s’immisce dans ce vaste poème dont les gris colorés annoncent le style cyclothymique d’un Ernest Chausson, et sortant de ce sombre labyrinthe, je me dis justement qu’il serait de temps pour cet attelage parfait d’enregistrer le Concert en ré majeur, contemporain sensible du Quintette de Franck, même si les Takács l’ont gravé voici vingt ans avec Jean-Yves Thibaudet et Joshua Bell. Autre temps, autre formation d’ailleurs.
LE DISQUE DU JOUR
César Franck (1822-1890)
Quintette pour piano et cordes en fa mineur, FWV 7
Claude Debussy (1862-1918)
Quatuor à cordes en sol mineur, Op. 10, L. 85
Marc-André Hamelin, piano
Quatuor Takács
Un album du label Hypérion CDA68061
Acheter l’album sur le site du label Hypérion Records, sur le site www.clicmusique.com
Photo à la une : © DR