Des Noctuelles ailées, des oiseaux endormis, étrangement perdus dans une selve sans soleil, une vague stylisée – transcription musicale de celle d’Hokusai, probablement –, dans Alborada pas de charge, mais une guitare allègre et légère, un tempo qui ne cède pas, et dont le récit met en son centre une habanera que très peu y font sonner ainsi, c’est bien vu.
Andrew Tyson atteint un degré supplémentaire dans les mystères ravéliens avec une Vallée des cloches très sombre et pourtant guère sollicitée : le tempo vif y fait tout en somme. Son pianisme où rien ne pèse mais tout suggère m’avait séduit dans les Préludes de Chopin, dans quelques Mozart aussi au Reine Elisabeth, je le retrouve intact dans ces Miroirs auxquels manque seulement le fantastique qu’Alexei Volodin y imprime aujourd’hui comme jadis Samson François.
Mais on ne refait pas sa nature, même lorsque Scriabine et son piano égocentrique justement la nient. C’est un peu vide dans la Troisième Sonate, de poids de son, mais aussi de feu, trop filigranée pour les incandescences de la Dixième, les correspondances par contrastes espérées par le jeune homme ne se produisent pas.
Le disque s’achevant, je me dis que tout un album Ravel aurait mieux convenu : Le Tombeau de Couperin, la Sonatine, les Valses nobles et sentimentales sont écrits pour lui. Demain, avec un peu plus de mystère, gageons qu’il y viendra.
LE DISQUE DU JOUR
Alexandre Scriabine (1872-1915)
Sonate pour piano No. 3
en fa dièse mineur, Op. 23
Sonate pour piano No. 10,
Op. 70
Maurice Ravel (1875-1937)
Miroirs M. 43
Andrew Tyson, piano
Un album du label Alpha Classics 277
Acheter l’album sur le site du label Alpha Classics ou sur Amazon.fr – Télécharger ou écouter l’album en haute-définition sur Qobuz.com
Photo à la une : © Christian Steiner