Dagmar fait sa Lotte

Idée irrésistible, du moins sur le papier. Dagmar Pecková, connue pour sa fantaisie et son aplomb, enregistre tout un disque du répertoire Weill chéri par Lotte Lenya.

Hélas, le modèle est vite embarrassant, il ne faut mieux pas confronter leurs Moritat von Mackie Messer ou leur Alabama Song. Là où Lenya fuse et mord, Pecková peine avec sa voix lourde, son vibrato envahissant, même si elle comprend l’esprit de cette musique, elle n’en a simplement plus les moyens, s’illusionnant sur le fait que Lenya elle-même chantât son Weill jusqu’au bout, mais même dans une voix usée à la trame, toujours claire et sonore, Pecková ne peut pas faire claquer les mots comme elle, son allemand n’est pas assez berlinois, son anglais trop gras, son français (méconnaissable Je ne t’aime pas) trop incertain.

Reste que pourtant l’album s’écoute même en enrageant, car les arrangements et la direction de Jan Kučera sont d’une intelligence rare, les interventions de Jiří Hájek assez géniales, la couleur d’ensemble est, elle, très Berlin même pour I’m a stranger here myself, ce qui est au fond assez bien vu.

Si vous êtes un inconditionnel de Pecková, vous voudrez l’album, mais moi, je retourne à Lotte Lenya et à Ute Lemper.

LE DISQUE DU JOUR

Wanted
Dagmar Pecková alias Mackie Messer

Kurt Weill (1900-1950)
Surabaya Johnny
Youkali
Der Abschiedsbrief
Berlin im Licht
Das Lied von den braunen Inseln
Buddy on the Nightshift
I’m a Stranger Here Myself

Die Dreigoschenoper
Extraits
Zuhälterballade
Die Seeräuber-Jenny
Barbarasong
Je ne t’aime pas
Kanonensong
Die Moritat von Mackie Messer

Aufstieg und Fall der Stadt Mahagonny
Extraits
Denn wie man sich bettet, so liegt man
Alabama Song

Dagmar Pecková, mezzo-soprano
Jiří Hájek, baryton
Epoque- Quartett and Orchestra
Miroslav Hloucal Jazz Band
Jan Kučera, voix, piano, direction

Un album du label Supraphon SU42262
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Photo à la une : © DR