En ouvrant avec les pirouettes de la Sonate K. 377 leur nouveau volume de l’intégrale des Sonates pour violon et piano (à moins que ce ne soit l’inverse) de Mozart, Cédric Tiberghien et Alina Ibragimova nous emmènent dans la part enchantée de ce jardin de musique qui a aussi ses instants de rêve : écoutez seulement le chant quasi d’opéra qui s’élève aux premières mesures de la Sonate K. 303. Qui donc attend la Comtesse ? Tiens, voilà justement Chérubin !

C’est bien le coup de génie de ce duo, renverser la table, faire sortir cet ensemble génial des conventions, du « discours de sonate » qui si longtemps les aura tenues seulement dans le sublime.

Déjà, Szymon Goldberg avec Lili Kraus puis Radu Lupu, secouait cette illusion, tellement bercé d’opéra lui-même. Alina Ibragimova, de son archet historiquement informé mais de son violon absolument libre, prend de fait la suite de ce pionnier, assumant ce que l’on sait des œuvres elles-mêmes depuis, de leurs contextes, de l’usage du violon, de ce que Mozart y entendait. Sur cette cantatrice qui n’hésite pas à se délurer, Cédric Tibeghien trisse son piano, orchestre et galerie de personnages à la fois. Quelle fête jusque dans les aventures mélodiques de la Sonate K. 403 que Stadler compléta !

Mais pour le coup de génie de la Sonate en si bémol majeur (K. 378), ce grand concerto à deux solistes, où aucun ne cède à l’autre, ils sont si prescients des émotions, vraiment si parfaits dans le jeu qu’ils dament même le pion à Szymon Golberg et Radu Lupu. Ces disques-là ne m’ont pas me quitté de l’été.

LE DISQUE DU JOUR

Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791)
Les Sonates pour violon
et clavier – Vol. 4

Sonate No. 3 en si b majeur,
K. 8
Sonate No. 8 en fa majeur,
K. 13
Sonate No. 11 en mi b majeur,
K. 26
Sonate No. 13 en ut majeur, K. 28
Sonate No. 20 en ut majeur, K. 303
Sonate No. 25 en fa majeur, K. 377
Sonate No. 26 en si bémol majeur, K. 378
Sonate No. 30 en ut majeur, K. 403
Variations en sol mineur pour piano et violon sur la mélodie
« Hélas, j’ai perdu mon amant », K. 360

Alina Ibragimova, violon
Cédric Tiberghien, piano

Un album de 2 CD du label Hypérion CDA68164
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Photo à la une : © DR