Ce sont les gemmes oubliées du piano romantique, d’ailleurs toute l’œuvre de clavier de Bedřich Smetana, qui en qualité et en volume, n’est pas si loin de celle de Schumann, reste peu courue en dehors de Tchéquie, et guère défendue par des pianistes qui ne sont pas nés ou n’ont pas été formés au bord de la Moldau. Voici l’occasion de saluer d’un grand coup de chapeau le plein album que consacre aujourd’hui Garrick Ohlsson aux deux cahiers des Danses tchèques.
Pour un pianiste si cultivé, et un virtuose aussi consommé, ces musiques difficiles ne devraient présenter aucune aspérité. Si Garrick Ohlsson les joue avec beaucoup de panache, un grand sens des atmosphères, et ce son de grand piano qui fit sa fortune chez Chopin, avec les années, son clavier s’est quelque peu épaissi, défaut qui le fait buter dans le redoutable Furiant qui ouvre le second cahier.
Là où Rudolf Firkušný envolait littéralement son piano (plus encore dans le remake pour Vox qu’en ses premiers essais chez Columbia ou Capitol), Garrick Ohlsson décompose le mouvement, phrase tout mais ne danse guère. C’est d’ailleurs l’élan qui lui manquera tout du long de ce disque par ailleurs admirable dans sa science de la composition, par ses accents lumineux, par cette façon de chanter dans les polyphonies d’un piano qui hésite souvent entre Liszt et Schumann, tout cela faisant largement assez d’invites pour venir y voir.
Il ajoute en postule l’étude d’arpèges d’Au bord de la mer, page sage en comparaison de l’invention et du caractère si marqué des Danses. Je l’aurais plutôt attendu dans le tableau génial de Macbeth et les sorcières où sa grande virtuosité aurait fait florès.
LE DISQUE DU JOUR
Bedřich Smetana (1824-1884)
Danses tchèques, Cahier 1, JB 1:107
Danses tchèques, Cahier 2, JB 1:114
Au bord de la mer – Un souvenir, JB 1:80
Garrick Ohlsson, piano
Un album du label Hypérion CDA68062
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Photo à la une : © Mark McBeth