Dvořák écrivit sa cantate fantastique pour Birmingham, sombre poème d’Erben où une jeune fille espérant le retour de son amant est abusée par un spectre qui au long d’une balade nocturne lui ravit tous ses atours jusqu’à sa chemise de noces, avant de la conduire au cimetière.
L’œuvre est noire, d’un ton épique, d’une couleur très Moyen-Âge qui n’est pas sans évoquer le Klagende Lied de Gustav Mahler, le disque l’a déjà documentée cinq fois, mais jusqu’ici aucune version n’était parvenue à égaler celle, historique, de Jaroslav Krombholc avec le spectre infernal de Beno Blachut et la jeune fille que Drahomíra Tikalová transformait en héroïne d’un opéra de bel canto romantique.
Cornelius Meister dresse des paysages fantasques, anime l’orchestre de Dvořák en le parant de teintes expressionnistes annonçant Mahler, lecture fascinante qui enfin se hausse au niveau de celle de Krombholc pour la vision, mais aussi pour la poésie.
Simona Šaturová est admirable de ligne, de sentiment, le baryton, qui ne fait que commenter l’action avec le renfort des chœurs, fulgurant, mais la palme revient au spectre séducteur de Pavol Breslik, plus amant que fantôme. Peu importe, sa voix de miel et sa ligne mozartienne sont irrésistibles, on le suivrait jusqu’au bout de l’enfer.
Sortant de cette version magnifique, je m’aperçois justement que le prochain projet à paraître de Cornelius Meister sera justement le Klagende Lied … tout s’explique !
LE DISQUE DU JOUR
Antonín Dvořák (1841-1904)
La Fiancée du spectre, ou Les Chemises de noces),
Op. 69, B. 135
Simona Šaturová, soprano (La Jeune fille)
Pavol Breslik, ténor (Le Mort)
Adam Plachetka, baryton-basse (Le Narrateur)
Wiener Singakademie
ORF Vienna Rundfunk-Sinfonie-Orchester
Conelius Meister, direction
Un album du label Capriccio C5315
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Photo à la une : © Marco Borggreve