Le centenaire Debussy produirait-il de vraies pépites discographiques ? Maurizio Pollini dans le Deuxième Livre de Préludes me le faisait accroire, ce prodigieux album où Emmanuel Krivine reprend quasiment à l’identique le programme qu’il enregistra voici peu avec l’Orchestre Philharmonique du Luxembourg – il ajoute le fragment tiré du Dialogue du vent et de la mer où Debussy avait d’abord noté une fanfare – le confirme.
Cette mer en bleue, froide et profonde, où tous les timbres d’un nouveau monde sonore se répondent en miroir, est absolument fascinante, par ses phrasés comme par sa constante dynamique : tout y est toujours en mouvement, tout y sonne avec un naturel qui est bien celui d’un art caché par l’art.
Une maîtrise souveraine règne ici, partagée intimement par le chef et ses musiciens, jusque dans les couleurs fauves qui seront plus encore employées dans Iberia. Le cycle des Images, par sa limpidité, son mouvement d’ensemble vif, l’évidence du jeu d’orchestre, rappelle Le geste si précis et si naturel que Pierre Monteux y aura mis à la fin de sa vie dans le mémorable disque Debussy enregistré avec l’Orchestre Symphonique de Londres pour Philips.
Mais c’est à La Mer que je reviens sans cesse, si intrigué par sa perfection factuelle, ses transparences, son irrépressible mouvement organique. Non plus une œuvre, mais un élément, non plus des paysages, mais une abstraction, non plus un paysage, mais la musique la plus pure qui soit.
Et maintenant s’il vous plait, le Prélude à l’après-midi d’un faune, Nocturnes, Jeux et les Rhapsodies !
LE DISQUE DU JOUR
Claude Debussy (1862-1918)
La Mer, L. 109 (version révisée 1909)
Images pour orchestre, L. 122
La Mer, L. 109 (version révisée, 1905, extrait : III. Dialogue du vent et de la mer, avec fanfares)
Orchestre National de France
Emmanuel Krivine, direction
Un album du label Erato 0190295687045
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Photo à la une : © DR