Nikolaï et Igor

On l’oublie, Nikolaï Malko, pur produit de l’école de direction impériale qui avait parfait son art auprès de Felix Mottl à Munich, était d’abord un moderniste, créateur de la Première Symphonie de Chostakovitch et soutient actif du jeune Stravinski.

Une fois exilé en Occident, Malko et le compositeur du Sacre du printemps se rapprochèrent, le premier devenant un interprète majeur du second, fait que le disque ignora – hélas : à Copenhague ou à Londres, les micros d’His Master’s Voice documentèrent l’art du grand chef russe, mais surtout dans le répertoire romantique slave qu’il éclairait de sa battue–scalpel comme personne.

La publication de ce concert donné à la l’auditorium de la Maison de la Radio danoise de Copenhague le 29 janvier 1959 remet les pendules à l’heure : Symphonie de psaumes orante, sans les sécheresses qui la dénaturent trop souvent, Concerto pour violon mordant, virtuose, où l’archet d’Ida Haendel cingle et persiffle avec une maestria effarante, Symphonie en trois mouvements abrupte comme une vraie musique de guerre (écoutez les ostinatos des cordes). Ce triptyque expose les œuvres dans toute leur modernité sans jamais forcer le trait. Derrière les audaces, Malko fait entendre à quel point la langue de Stravinski se fond dans la grande tradition russe.

Le concert se referme par une Suite de L’Oiseau de feu aux dosages savants, vrai conte de terreur et d’émerveillement où l’orchestre parle, saisissant point d’orgue d’une soirée historique. C’est le 19e volume qu’Yves St Laurent consacre à l’art de ce chef trop délaissé par son éditeur officiel. Bravo !

LE DISQUE DU JOUR

Igor Stravinski (1882-1971)
Symphonie en trois mouvements
Concerto pour violon et orchestre en ré
Symphonie de psaumes
L’Oiseau de feu (Suite 1919)

Ida Haendel, violon
Chœur et Orchestre National de la Radiodiffusion danoise
Nikolaï Malko, direction

Un album de 2 CD du label Saint-Laurent Studio YSL-T709
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Photo à la une : © DR