Je désespérais de retrouver le piano lyrique d’Herbert Schuch : après avoir quitté Oehms pour Naive Classique, qui ne lui aura consacré qu’un disque, il n’avait plus d’éditeur. Mais le revoilà, en duo – quatre mains ou deux pianos – avec Gülru Ensari, en fait leur deuxième opus pour CAvi-Music, leur premier disque consacré au Sacre du printemps m’avait échappé, j’y reviendrai.
La Sonate de Mozart est un prélude divinement joué à tout autre chose : un sujet Debussy. Mais il y a une telle grâce dans leur Mozart, une telle fluidité, une telle pureté de dessin qu’au fond le mystère lumineux qui en émane – écoutez l’Andante dont les guirlandes ont quelques chose de schubertien – est une parfaite introduction au reste du disque.
En blanc et noir aura connu des lectures plus contrastées : le bal avec cornet du premier volet devient une impressionnante étude de couleurs en mouvement, magique à force de complexité. Ses irisations immatérielles conduisent logiquement au désert sinistre de ce Lent.Sombre où Debussy aura résumé tout ce que son piano serait devenu s’il avait survécu à son cancer. Fuligineux, abstrait, le Scherzando suspend ses musiques éparses, vrai tableau abstrait.
Le coup de génie du disque est d’avoir placé en postlude son véritable objet, les géniaux Monologue für zwei Klaviere où Bernd Alois Zimmermann a résumé des fameux Dialogues pour deux pianos et orchestre de 1964.
Bach y paraît dans le premier Monologue, mais c’est une obsession Debussy qui conduit les quatre autres stations de ce cycle parfait, joué avec une précision diabolique par les deux pianistes, porte ouverte sur un onirisme sonore dont je ne parviens pas à me déprendre.
LE DISQUE DU JOUR
Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791)
Sonate pour piano à 4 mains en ut majeur, K. 521
Claude Debussy (1862-1918)
En blanc et noir, L. 142
Bernd Alois Zimmermann (1918-1970)
Monologe
Gülru Ensari, piano
Herbert Schuch, piano
Un album du label CAvi-Music 8553406
Acheter l’album sur le site www.clicmusique.com, ou sur Amazon.fr – Télécharger ou écouter l’album en haute-définition sur Qobuz.com
Photo à la une : Herbert Schuch et Gülru Ensari – Photo : © Felix Broede