Un ballet, un vrai ! Dans les couleurs vives des instrumentistes français, Anatole Fistoulari, qui n’avait pas sa baguette dans sa poche, délivre la version la plus narrative de La Belle au bois dormant que le disque ne connaîtra jamais. Un vrai théâtre dansé, et peu importe que le chef abrège un peu la partition – probablement pour nous faire le tout plus scénique à l’oreille – d’ailleurs, en ce début des années cinquante, tous faisaient pareil et au disque seul Boris Khaïkine voudra enregistrer chaque note de l’œuvre, une fois la stéréophonie venue.
Le sens du mouvement et l’humeur fantaisiste que Fistoulari produit dans les grands passages d’ensemble dont Tchaïkovski a truffé son ballet emporte tout ici, brio fou qui touche toujours juste pour les sentiments et laisse transparaître une divine poésie que les timbres légers des instrumentistes français avivent – les bois sont magnifiques, les solos de violon et de violoncelle admirables pour la narration comme pour les couleurs – tant Fistoulari les modèle avec ce qu’il faut bien appeler du génie : quel caractère partout !
Eloquence ajoute une gravure inexplicablement oubliée de la 4e Symphonie. En 1971, Decca se souvint de l’existence de Fistoulari et lui proposa d’enregistrer dans leur processus Phase 4 à nouveau une œuvre de Tchaïkovski.
Version magistrale au premier sens du terme : les tempos retenus, le geste sévère, l’absence de tout pathos, la puissance déclamatoire des phrasés sont absolument d’un maître qui contrôle tout jusqu’à l’élan d’un Finale retenu pour produire une coda inoubliable.
LE DISQUE DU JOUR
Piotr Ilitch Tchaïkovski (1840-1893)
La Belle au bois dormant,
Op. 66, TH 13
Symphonie No. 4 en fa mineur, Op. 36 TH 27
Orchestre de la Société des Concerts du Conservatoire de Paris
Royal Philharmonic Orchestra
Anatole Fistoulari, direction
Un album de 2 CD du label Decca 4827223 (Collection « Eloquence Australie »)
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