Si l’instrument de Grażyna Bacewicz fut le violon – ses Concertos sont géniaux, trouvez-les ! – elle fut également une pianiste de première force et lui consacra une part assez étendue de son œuvre où son irrépressible suractivité hérissait le clavier de rythmes ardus et l’éclatait à force de polytonalité.
Le Petit tryptique est d’une insolence qui frôle l’hystérie, la Suite pour les enfants gifle plus qu’elle ne sourit, les Etudes de concert sont des vacheries où elle semble narguer Bartók, alors qu’elle fait un sort à la grande tradition pianistique polonaise avec son Krakowiak qui mêle le rire au grand apparat.
Quel univers désopilant, virtuose autant pour les doigts – et Morta Grigaliūnaitė relève tous les défis – que pour l’intellect : Bacewicz est un caméléon, son piano change de couleur en une fraction de seconde.
La vraie merveille du disque – à côté d’une Deuxième Sonate impressionnante de densité, un des chefs-d’œuvre du piano du XXe siècle que Morta Grigaliūnaitė joue avec des respirations orchestrales – reste les Trois pièces caractéristiques, bref triptyque panthéiste où des motifs folkloriques des Tatras viennent dorer le clavier, le pimentant avec tout l’art des diffractions harmoniques dont la compositrice avait le secret. C’est toute une part de son univers qui s’offre ici, il faut espérer un second volume sous les doigts de cette pianiste inspirée.
LE DISQUE DU JOUR
Grażyna Bacewicz
(1909-1969)
Petit tryptique
Krakowiak de concert
Suite pour les enfants
2 Études pour les doubles notes
10 Études de concert
3 Pièces caractéristiques
Sonate pour piano No. 2
Morta Grigaliūnaitė, piano
Un album du label Piano Classics PCL10183
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Photo à la une : la pianiste Morta Grigaliūnaitė – Photo : © Jasmine Andrews