On est au concert, durant les schubertiades 2018 en septembre, voyage de fin d’été ou de début d’automne, je ne sais trop d’où vient cette nostalgie dorée avec laquelle Pavol Breslik envole de son timbre de Ferrando les poèmes de Müller, cette douceur tragique dès Gute Nacht qui envoûte jusqu’au piano immobile d’Amir Katz.
Ah !, ces deux-là nous avaient déjà fait une Schöne Müllerin où passait le souvenir de celle de Wunderlich, mais Wunderlich n’eut pas le temps d’aller jusqu’à Winterreise – auquel il serait venu, c’est certain.
Breslik, formé dans ses Mozart, devenu vrai liedersänger par pure fascination de Schubert d’abord, aura pris le temps. Fragile, il entre ici en tremblant, affaire de timbre si clair, si mozartien où la lumière joue dans les mots et fait à elle seule les inflexions si souples, les élans si déchirants, avec quelque chose de latin – l’imprécation à la Corneille est saisissante en cela.
Qui faisait ainsi déjà ? Au oui, Anton Dermota, venu très tard au cycle, et avec un timbre, mieux une phonation, très proches : affaire de culture et de naissance, l’un et l’autre sont nés dans des régions voisines, non loin de l’Italie et dont le seul horizon musical fut toujours Vienne.
Mais ce Winterreise qui vous perd dans sa lyrique effusive et tendre, meilleur moyen de le rendre plus cruel et plus impeccable, célèbre d’abord l’alliage parfait entre une voix et un clavier, car l’autre héros de cette version stupéfiante est bien Amir Katz, pianiste poète dont les disques en soliste chez Orfeo m’ont jusqu’alors échappé. Je vous en causerai bientôt.
LE DISQUE DU JOUR
Franz Schubert
(1797-1828)
Winterreise, D. 911
Pavol Breslik, ténor
Amir Katz, piano
Un album du label Orfeo C934191
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Photo à la une : le ténor Pavol Breslik – Photo : © DR