Orage

Il fallait l’oser : diriger du clavier cette symphonie qui est à peine un concerto et où le jeune Brahms aura fait, comme dans ses deux premières Sonates de piano, sa révolution.

Pour l’intrada, jouée large, plus inquiète que fulgurante, vrai paysage de Baltique, Lars Vogt s’affirme absolument chef, et qui connaît sur le bout des doigts son Brahms : cela vit, respire, s’élance, le piano peut entrer, il sonnera altier dès les premières mesures, avec une élégance folle, quelque chose de tenu et de nostalgique que je n’y avais pas entendue depuis William Kapell, et avec cette même volonté de ne pas traîner, de ne pas alentir cette tempête qui se cache derrière l’indication Maestoso.

L’orchestre ne l’accompagne pas, il se fait entendre du piano, donnée nouvelle qui accroît encore l’aspect révolutionnaire de ce poème épique. L’Adagio est un nocturne d’un lyrisme où soudain passe l’ombre de Schumann, comme c’est bien vu !, alors que le Rondo, vif, sculpté d’un geste léger, se pimente à peine d’hungarismes, filant dans une lumière dorée.

Pour aussi surprenant que soit le Concerto, Lars Vogt va plus loin encore dans les Ballades, les peignant dans d’incroyables clairs-obscurs, préférant à une narration le pinceau d’un peintre qui fait chanter les couleurs et dévoile des horizons : toujours ces tempos lestes, qui envolent le chant de la Quatrième Ballade d’un seul élan lumineux, merveille presque trop discrète qui laisse espérer pour demain d’autres disques Brahms.

LE DISQUE DU JOUR

Johannes Brahms
(1833-1897)
Concerto pour piano et orchestre No. 1 en ré mineur, Op. 15
4 Ballades, Op. 10

Lars Vogt, piano, direction
Royal Northern Sinfonia

Un album du label Ondine ODE1330-2
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Photo à la une : le pianiste Lars Vogt – Photo : © Neda Navaee