Au centre de l’Allegro energico ma non troppo, Gustav Mahler élargit la focale : un paysage de montagne se dévoile dans une sublime nuit d’étoiles, les cloches de troupeaux invisibles dorant les pâturages sonores, musique venue absolument d’une autre planète, où Tomáš Netopil et le Philharmonique d’Essen s’attardent, si lyriques.
Leur Sixième Symphonie, second volet de ce qui semble une intégrale en devenir, est d’une envoûtante beauté, sans rien du ton violent, des effets grandiloquents, de l’agitation convulsive qu’on associe trop souvent à cette œuvre stupéfiante.
Ce n’est pourtant pas l’ardeur qui manque ici, mais Tomáš Netopil refuse la dimension expressionniste, la dirigeant comme une œuvre classique viennoise (ce que Jascha Horenstein répétant le Scherzo – l’enregistrement existe – demandait autrefois à ses musiciens : « Jouez cela comme du Mozart »), sans rien souligner, laissant les lignes se déployer, les crescendos fuser.
Signe révélateur, il place contre la doxa récente, le Scherzo en seconde position, le dirigeant sur les pointes, fouettant le rythme, restant élégant dans le brasier sonore, prélude au plus rapide des Andante que je connaisse, un peu moins de seize minutes, grand travelling nocturne qui déploie sa ligne mélodique infinie, et chante comme une aria de Mozart. Le Finale pourra venir, désespéré, sans aucun effet, sombre comme la mort.
Grande version, pour qui saura lui donner toute son attention.
LE DISQUE DU JOUR
Gustav Mahler (1860-1911)
Symphonie No. 6 « Tragique »
Essener Philharmoniker
Tomáš Netopil, direction
Un album de 2 CD du label Oehms Classics OC1716
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Photo à la une : le chef d’orchestre Tomáš Netopil – Photo : © Vojtěch Havlík