Senta

Vingt-cinq années durant, Júlia Várady fut la soprano assoluta de l’Opéra de Munich, n’admettant dans son empirée que Margaret Price dont elle ne partagea guère les rôles en dehors de quelques héroïnes verdiennes. Plutôt que de publier avec elle des intégrales des Meistersinger, de La forza del destino, de La Clemenza di Tito, d’Idomeneo, Orfeo préfère lui offrir deux disques regroupant des airs pris sur le vif.

Du reste le label bavarois a fait quelques exceptions : « D’amor sull’all rosee » qui clôt ce volume est repris de l’intégrale d’un Trovatore incendié par Giuseppe Sinopoli qui lui fut publié au complet comme l’Arabella de Sawallisch.

Chez Mozart, l’élégance urgente de la ligne est un modèle surtout pour les fureur d’Elettra que Sawallisch emporte avec rage et il nous faudrait l’intégrale de la soirée comme celle de La Clemenza di Tito selon Reynaldo Giovaninetti, où Vitellia légendaire, elle avait pour Sesto Brigitte Fassbaender et pour Titus l’inoxydable Werner Hollweg, ainsi que la Servilia de Lilian Sukis. Le théâtre l’enflammait plus que le studio alors, pourtant Orfeo préfère prendre le Rondo dans une représentation plus tardive dirigée par Bernhard Klee en 1989, magnifique encore, mais…

Du côté des Italiens, les deux Leonora sont à tomber, incendiaires, et la scène de La Forza avec le Padre Guardiano de Kurt Moll une sorte d’idéal (et comme Sinopoli dirige cela !). Alors que son Abigaïlle la montre à la fois belcantiste et héroïque, aussi tard qu’en 1990, vraie leçon de chant.

Pourtant ce sont ces deux héroïnes wagnériennes qui m’étreignent d’abord, Eva solaire évidemment dans un quintette luxueusement distribué (là encore, qu’attend Orfeo pour publier ces Meistersinger selon Wolfgang Sawallisch !), mais surtout Senta dont elle dit la Ballade avec une terreur qui au final s’exalte dans une pure folie de chant où le sacrifice s’impose. Là encore l’intégrale, sous la baguette weberienne de Sawallisch mériterait d’être publiée.

LE DISQUE DU JOUR

Airs de Wolfgang Amadeus Mozart (Idomeneo, La Clemenza di Tito), Richard Strauss (Arabella), Richard Wagner (Der Fliegende Holländer, Die Meistersinger von Nürnberg) et Giuseppe Verdi (La forza del destino, Nabucco, Il Trovatore)

Júlia Várady, soprano

Dietrich Fischer-Dieskau, baryton (Arabella, Die Meistersinger von Nürnberg)
René Kollo, ténor (Die Meistersinger von Nürnberg)
Peter Schreier, ténor (Die Meistersinger von Nürnberg)
Cornelia Wulkopf, mezzo-soprano (Die Meistersinger von Nürnberg)
Kurt Moll, basse (La forza del destino)

Bayerisches Staatsorchester
Wolfgang Sawallisch, direction (Idomeneo, Arabella, Der fliegende Holländer, Die Meistersinger von Nürnberg)
Bernhard Klee, direction (La clemenza di Tito)
Giuseppe Sinopoli, direction (La forza del destino, Il trovatore)
Pinchas Steinberg, direction (Nabucco)

Un album du label Orfeo C579041B
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Photo à la une : la soprano Júlia Várady – Photo : © Orfeo