Peu de violonistes auront su saisir dans leur archet la vaste rapsodie tempétueuse et nostalgique du Concerto pour violon de Sir Edward Elgar, Jascha Heifetz passant lui-même magnifiquement à côté de l’œuvre.
Nicola Benedetti s’y engage avec le feu que je lui connais, les sonorités si contrastés de son stupéfiant violon dont je ne sais rien mais qui parle dans des couleurs de mezzo colorature si singulières transportant son discours. C’est Elgar qui parle, dès son entrée après le vaste décor de tempête que lui aura dressé Vladimir Jurowski.
Ensemble, ils transfigurent ce concerto-symphonie, l’empoignant appassionato comme je ne l’avais plus entendu proclamé depuis la lecture torrentielle de Dmitri Sitkovetsky et de Yehudi Menuhin (Virgin), Vladimir Jurowski cravachant son orchestre dans les rares sections où le soliste leur laisse la parole pour mieux y opposer son poème, si éloquent dans ce violon dont la main gauche fixe les récits intenses.
Je crois que ma prose est impuissante à évoquer tout cela, alors écoutez plutôt, et une fois que ce Concerto génial si implacablement incarné vous aura harassé, reprenez votre souffle dans les trois petits poèmes où, frôlant de son archet le clavier de Peter Limonov, Nicola Benedetti n’oublie pas, jusque dans le plaisir, cette ombre qui l’aura hantée.
LE DISQUE DU JOUR
Sir Edward Elgar (1857-1934)
Concerto pour violon et orchestre en si mineur, Op. 61
Sospiri, Op. 70 (arr. pour violon et piano)
Salut d’amour, Op. 12
Chanson de nuit, Op. 15 No. 1
Nicola Benedetti, violon
Peter Limonov, piano
London Philharmonic Orchestra
Vladimir Jurowski, direction
Un album du label Decca 0002894850949
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Photo à la une : la violoniste Nicola Benedetti – Photo : © DR