Decca finit par céder à l’insistance de John Culshaw, qui avait promené son équipe technique de Vienne à Berlin. Un chef « à l’ancienne » méritait d’intégrer l’équipe de l’éditeur anglais, Hans Schmidt-Isserstedt. Ce petit homme à la battue karajanesque avait passé les années nazies à pied sec malgré les nombreux postes officiels occupés durant la guerre. Les Américains lui demandèrent de reprendre en main le destin musical de la ville de Hambourg : en quelques années, il en fit une formation égalant le Philharmonique de Berlin. Culshaw lui propose d’enregistrer plutôt avec les Wiener Philharmoniker, fixant une intégrale des Symphonies de Beethoven demeurée immaculée pour le style comme pour l’espressivo, et d’accompagner Wilhelm Backhaus pour son remake stéréophonique des cinq concertos.
Avant ces sessions viennoises, John Culshaw avait saisi l’occasion d’une venue à Londres de la formation hambourgeoise pour engranger quelques prises au Kingsway Hall. L’année précédente une Cinquième Symphonie de Tchaikovski avait précédé ; rapidement publiée, elle avait suscité l’enthousiasme de la critique. ), les voici enfin rééditées.
Sujet Dvořák, avec une Septième Symphonie lyrique et tempétueuse à la fois, très slave de ton, Schmidt-Isserstedt, si versé dans Brahms, savait varier son style selon les répertoires, comme le prouvent l’élan et la fantaisie des quatre Danses slaves enregistrées quelque temps plus tard. Leur panache ne fait pourtant pas oublier les sombres splendeurs de cette implacable Septième.
Les sessions londoniennes ajoutèrent sept Danses hongroises où le chef s’emploie à faire entendre, derrière les vêtures symphoniques réalisées par les différents orchestrateurs (dont Brahms lui-même), la poésie des originaux pour clavier.
Hans Schmidt-Isserstedt devait revenir à Dvořák dix ans plus tard, mais cette fois sans John Culshaw, dans son fief hambourgeois et pour Deutsche Grammophon. Objet, les deux Sérénades, peu courues (et celle pour vents encore moins que celle pour cordes) au disque sinon par des chefs tchèques. La finesse de réalisation de la Sérénade pour cordes, aux nuances de phrasés infinies, la poésie savoureuse de celle pour vents, auxquels Schmidt-Isserstedt demande des accents typiques, font de ce disque resté rare depuis sa parution une merveille enfin accessible.
LE DISQUE DU JOUR
Antonín Dvořák (1843-1907)
Symphonie No. 7 en ré mineur, Op. 70, B. 141
8 Danses slaves, Op. 46, B. 83 (3 extraits : No. 1 en ut majeur, No. 2 en mi mineur, No. 3 en la bémol majeur)
8 Danses slaves, Op. 72, B. 147 (3 extraits : No. 8 en la bémol majeur)
Sérénade pour cordes en mi majeur, Op. 22, B. 52
Serenade pour vents en ré mineur, Op. 44, B. 77
Johannes Brahms (1833-1897)
21 Danses hongroises, WoO 1 (extraits : Nos. 1, 2, 3, 5, 6, 7 & 10)
NDR-Sinfonieorchester
Hans Schmidt-Isserstedt, direction
Un album de 2 CD du label Decca 4840365 (Collection Eloquence Australie)
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Photo à la une : le chef d’orchestre Hans Schmidt-Isserstedt – Photo : © Decca