Surprise, Evidence publie à une distance de douze années ce Lied von der Erde donné en juin 2008 dans le grand vaisseau de la Basilique de Saint-Denis, et avec raison. Le concert est superbe d’intensité expressive, d’émotion, emporté par la baguette lyrique de Jean-Claude Casadesus, inspiré par le chef-d’œuvre d’un compositeur qu’il affectionne depuis toujours.
Je me souviens d’une passionnante discussion qu’il eut avec Georges Sébastian, s’étonnant que celui-ci, invité malgré son grand âge à diriger son orchestre, n’avait pas inscrit au programme de son concert une œuvre de Gustav Mahler, et Georges Sébastian d’enchaîner en lui apprenant qu’il avait nommé sa maison de l’Epinette « Le Chant de la Terre », la conversation roulant tous ses feux sur Bruno Walter et Mahler.
La beauté descriptive de l’Abschied, où les souffleurs Lillois font quelques prodiges, suffirait à prouver les affinités électives que Jean-Claude Casadesus entretient depuis longtemps avec les œuvres de Mahler, d’ailleurs il aura fait travailler à son orchestre nombre de symphonies, si bien qu’Alexandre Bloch aura pu en proposer l’intégrale, s’appuyant sur le travail de son prédécesseur.
Violeta Urmana est ici infiniment plus libre qu’avec Pierre Boulez, l’étoffe de la voix est somptueuse, le vibrato expressif maîtrisé et colorant les mots, apportant ce sfumato émotionnel à Der Einsame im Herbst qui lui manque si souvent, et déployant dans l’Abschied cette voix longue, d’une abondance harmonique entêtante.
Jon Villars, qui remplaçait ce jour-là au pied levé Clifton Forbis – l’éditeur a oublié de corriger – héroïque, ardent, était-il alors le plus beau ténor pour les trois lieder de plaisir et d’ivresse ? C’est probable. Concert mémorable qui s’ajoutera de facto à vos autres Lied von der Erde.
Alexandre Bloch s’est lancé avec son Orchestre National de Lille dans une intégrale des symphonies de Gustav Mahler. Prendrait-il des risques en la commençant par l’insaisissable Septième Symphonie qui pose toujours plus de questions à ses interprètes qu’elle ne leur apporte de réponses ?
Les tempos prudents de chacun des mouvements, les phrasés estompés, le ton crépusculaire de l’ensemble, tout veut faire de cette symphonie singulière un vrai chant de la nuit et d’ailleurs cette lecture culmine dans une assez merveilleuse deuxième Nachtmusik, toute en nuances pianissimos. Mais basta, hélas dans les deux grands mouvements qui encadrent le triptyque descriptif, l’élan manque par trop, la ligne ne se trouve pas et le Finale sonne prosaïque. La prise de son, mate, n’aide en rien, mais je ne préjuge pas de la suite d’un cycle annoncé.
LE DISQUE DU JOUR
Gustav Mahler (1860-1911)
Das Lied von der Erde
Violeta Urmana,
mezzo-soprano
Jon Villars, ténor
Orchestre National de Lille
Jean-Claude Casadesus, direction
Un album du label Evidence EVCD057
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Gustav Mahler (1860-1911)
Symphonie No. 7
Orchestre National de Lille
Alexandre Bloch, direction
Un album du label Alpha 592
Acheter l’album sur le site du label Evidence ou sur Amazon.fr – Télécharger ou écouter l’album en haute-définition sur Qobuz.com
Photo à la une : le chef d’orchestre Jean-Claude Casadesus – Photo : © DR