Das Klagende Lied, le conte horrifique, chef-d’œuvre absolu du jeune Gustav Mahler, manquait à la discographie de Michael Gielen. Miracle !, la Radio autrichienne avait conservé l’exécution fulgurante qu’il en avait donnée le 8 juin 1990, la voici enfin publiée.
Comme Pierre Boulez, Michael Gielen donne l’œuvre au complet, avec la grande ballade sombre du Waldmärchen, et expose toutes les audaces du langage mahlérien, orchestre saisissant par sa variété d’alliages de timbres, chœurs aux traitements vocaux novateurs, dispersion des effets sonores qui ne sont pas sensibles seulement pendant la Hochzeitsstück qui recourt à la coulisse.
Plus encore que Pierre Boulez, Gielen est sensible à la poésie de ce conte tragique, et en exalte le ton expressionniste, les couleurs enténébrées, assumant également la structure singulière de l’œuvre et le télescopage des styles qui proviennent à la fois des ballades schumaniennes et des oratorios de la tradition romantique.
Quatuor de solistes magnifique, même si la soprano est parfois mise à l’épreuve d’une tessiture justement signalée comme meurtrière. Cast dominé par le Spielmann expressif de David Rendall, ce magnifique ténor mozartien si peu documenté au disque, et par Marjana Lipovšek dont le sombre mezzo fait une prophétesse.
Soirée imparable, ajout majeur à la discographie du chef comme à celle du compositeur.
LE DISQUE DU JOUR
Gustav Mahler (1860-1911)
Das Klagende Lied
(version 1893)
Brigitte Poschner-Klebel,
mezzo-soprano
Marjana Lipovšek,
mezzo-soprano
David Rendall, ténor
Manfred Hemm, baryton
Wiener Singakagemie
ÖRF Radio-Symphonieorchester Wien
Michael Gielen, direction
Un album du label Orfeo C210021
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Photo à la une : le chef d’orchestre Michael Gielen – Photo : © DR