En postlude à cet album saisissant qui présente les deux premières Sonates – déjà rarement enregistrées – Joanna Sochacka grave en première mondiale la Sonate de 1930, où une Grażyna Bacewicz de vingt ans invente sa poésie crépusculaire en la déduisant de la Sonate d’Alban Berg. Le Moderato e maestoso – huit minutes d’une musique ténébreuse, d’une force suggestive fascinante – montre déjà tout l’univers d’un compositeur qui révolutionna la musique polonaise bien avant Lutosławski ou Penderecki.

Peu à peu, on rend donc justice à l’œuvre de ce génie. Cet album ajoute une nouvelle pièce au dossier Bacewicz. Musicienne accomplie, elle maîtrisait autant le violon que le piano, mais les opus qu’elle aura laissés pour le second restent méconnus malgré l’attention que leur aura porté Krystian Zimerman.

Les deux Sonates composées en 1949 et en 1953 se contrastent l’une l’autre, la Première laisse encore le clavier s’envoler en des élans scriabiniens, alors que la Deuxième est un fondu au noir saisissant : en deux œuvres, on tient tous les visages de ce que le compositeur pouvait produire au piano.

Joanna Sochacka traque la poésie et magnifie les noires fureurs de ces pages souvent énigmatiques, au point que je n’ai pas quitté ce disque plusieurs jours durant. Les Etudes apportent des respirations nécessaires, celle en tierces amenant soudain une nuance giocoso dans ce disque d’une obscure clarté. Et si Joanna Sochacka poursuivait son exploration chez Bacewicz, nous offrant enfin l’intégrale de tout ce qu’elle a écrit pour le piano ?

LE DISQUE DU JOUR

Grażyna Bacewicz (1909-1969)
Sonate pour piano No. 2 (1953)
2 Études (1952)
Sonate pour piano No. 1 (1949)
Étude de concert (1949)
Sonate pour piano (1930)

Joanna Sochacka, piano

Un album du label DUX 1689
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Photo à la une : la pianiste Joanna Sochacka – Photo : © DR