S’il y a bien un compositeur, a égalité avec Mozart, qui offrit à Sir Neville Marriner son plus merveilleux terrain de chasse, ce fut bien Joseph Haydn. La pureté classique du trait, l’équilibre fusant du discours, et jusque à cet humour subtil qu’il semble avoir hérité de Sir Thomas Beecham, lequel posa Outre-Manche les canons d’interprétation spirituels et à la fois un peu rustiques, tout cela jaillit littéralement du grand ensemble de Symphonies qu’il grava pour Philips durant les décennies 1970–1980.
Que choisir dans un ensemble si vaste, parcouru depuis les années soixante par Marriner et son Academy ? L’amorce du projet se fit sur les Symphonies à titre, ce qui permettait de couvrir tout l’orbe du cycle, du Matin (n° 6) au Roulement de timbales (n° 103), mais surtout de mesurer l’évolution du style, des ultimes inventions du Sturm und Drang à la grande forme classique.
Fil rouge bien repéré par Marriner : l’art narratif. Haydn se sert de ses symphonies pour conter des histoires, que le chef se régale à mettre en scène, individualisant chaque opus. Christopher Hogwood se souviendra de cette façon, parachevant en quelque sorte les intuitions philologiques que Marriner suggère, rejetant le legato, jouant court et rythmé, allégeant tout.
C’est formidable pour le grand train des symphonies médianes (sa Mercure, son Feu et ses Adieux, sa Passione frôlent le génie, on voit littéralement la partition tant tout est clair), ce sera tout aussi révélateur dans les quelques Londoniennes, jouées solaires.
À mesure, des symphonies sans titre s’ajoutèrent, faisant espérer un moment que l’intégrale serait achevée. Hélas non, et à la coda des Parisiennes, autre sommet de la somme, quel regret de ne pas avoirs la 88e ! Je crois d’ailleurs l’entendre tant ce Haydn imprime sa joie de vivre.
LE DISQUE DU JOUR
Franz Joseph Haydn (1732-1809)
CD 1
Symphonie No. 6 en ré majeur, Hob. I:6 « Le Matin »
Symphonie No. 7 en ut majeur, Hob. I:7 « Le Midi »
Symphonie No. 8 en sol majeur, Hob. I:8 « Le Soir »
CD 2
Symphonie No. 22 en mi bémol majeur, Hob. I:22 « Le Philosophe »
Symphonie No. 55 en mi bémol majeur, Hob. I:55 « Le Maître d’école »
CD 3
Symphonie No. 31 en ré majeur, Hob. I:31 « Signal de cor »
Symphonie No. 73 en ré majeur, Hob. I:73 « La Chasse »
CD 4
Symphonie No. 43 en mi bémol majeur, Hob. I:43 « Mercure »
Symphonie No. 59 en la majeur, Hob. I:59 « Le Feu »
CD 5
Symphonie No. 44 en mi mineur, Hob. I:44 « Funèbre »
Symphonie No. 49 en fa mineur, Hob. I:49 « Passion »
CD 6
Symphonie No. 45 en fa dièse mineur, Hob. I:45 « Les Adieux »
Symphonie No. 101 en ré majeur, Hob. I:101 « L’Horloge »
CD 7
Symphonie No. 48 en ut majeur, Hob. I:48 « Maria Theresia »
Symphonie No. 85 en si bémol majeur, Hob. I:85 « La Reine »
CD 8
Symphonie No. 52 en ut mineur, Hob. I:52
Symphonie No. 53 en ré majeur, Hob. I:53 « L’Impériale »
CD 9
Symphonie No. 60 en ut majeur, Hob. I:60 « Le distrait »
Symphonie No. 63 en ut majeur, Hob. I:63 « La Roxelane »
Symphonie No. 69 en ut majeur, Hob. I:69 « Laudon »
CD 10
Symphonie No. 82 en ut majeur, Hob. I:82 « L’Ours »
Symphonie No. 83 en sol mineur, Hob. I:83 « La Poule »
CD 11
Symphonie No. 84 en mi bémol majeur, Hob. I:84
Symphonie No. 86 en ré majeur, Hob. I:86
Symphonie No. 87 en la majeur, Hob. I:87
CD 12
Symphonie No. 92 en sol majeur, Hob. I:92 « Oxford »
Symphonie No. 104 en ré majeur, Hob. I:104 « Londres »
CD 13
Symphonie No. 94 en sol majeur, Hob. I:94 « Surprise »
Symphonie No. 96 en ré majeur, Hob. I:96 « Le Miracle »
CD 14
Symphonie No. 99 en mi bémol majeur, Hob. I:99
Symphonie No. 102 en si bémol majeur, Hob. I:102
CD 15
Symphonie No. 100 en sol majeur, Hob. I:100 « Militaire »
Symphonie No. 103 en mi bémol majeur, Hob. I:103 « Roulement de timbales »
Academy of St. Martin-in-the-Fields
Sir Neville Marriner, direction
Un coffret de 15 CD du label Decca 4843214 (Collection Eloquence Australia)
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Photo à la une : le chef d’orchestre Sir Neville Marriner – Photo : © DR