Abstractions

Des ballets, des rites, des récits et des contes ? Klaus Mäkelä tourne le dos à tout ce que l’on sait du Sacre du printemps et de L’Oiseau de feu.

Le premier ne sera pas ce manifeste du modernisme ancré dans une Rousse immémoriale, le second cet adieu à la Russie de Nikolai Rimski-Korsakov. L’œil du chef colle aux partitions, ne se soucie que d’elles, les débarrasse de tout contexte. Musiques pures, absolument, et pour Le Sacre un impitoyable jeu de formes où s’exalte la monstrueuse machine orchestrale qui broiera certes, mais aussi saura atteindre à l’hypnose : écoutez les Cercles mystérieux des adolescents.

Ce Sacre abstrait ne vivrait pas avec une telle sensualité – c’est l’un de ses paradoxes – sans les fabuleuses symphonies de timbres dont le pare l’Orchestre de Paris. Pour L’Oiseau de feu, cette folie de couleurs déborde littéralement la partition, mais là encore, elle sert une abstraction en diluant le temps du ballet dans une symphonie belle comme un Kupka.

Abstraction lyrique qui, comme pour Le Sacre, exige des tempos larges, et préfère exposer les jeux formels que Stravinsky aura dissimulés derrière la pantomime. Un propos si radical pourra déconcerter, mais partitions en main, je crois redécouvrir les œuvres, signe que ce jeune homme est bien un génie, quoi qu’on en dise.

LE DISQUE DU JOUR

Igor Stravinsky (1882-1971)
Le sacre du printemps
L’oiseau de feu (version 1911)

Orchestre de Paris
Klaus Mäkelä, direction

Un album du label Decca Records 4853946
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Photo à la une : le chef d’orchestre Klaus Mäkelä – Photo : © DR