Quel crépuscule ! À deux ans de sa mort, Gesualdo, rongé par la maladie, n’a plus le temps que pour des chefs-d’œuvre, les sensualités torturées de son univers profane et l’expiation douloureuse des ténèbres s’enlaçant telles deux lianes.
C’est cette même veine qui arde les étrangetés harmoniques des madrigaux comme l’exaltation tragique des Répons, et dans l’un et l’autre, expose le sens premier comme les sens cachés des textes. Car il y a chez Gesualdo un goût du mystère, le raffinement d’un art « à tiroirs » qui fait du madrigal le sommet de l’art vocal savant.
Paul Agnew et Les Arts Florissants abordent les deux pans de cette année 1611 avec des images mentales qui semblent échappées d’une toile du Caravage : cette obscure clarté que distillent ces polyphonies emplies de frottements harmoniques étranges, ces mots délités par les accords vacillants des voix, les couleurs diluées dans les sfumatos des voyelles, tout cet univers poétique reste si fascinant de modernité comme si Gesualdo avait passé à pied sec trois siècles et nous parlait en contemporain, voilà bien le miracle de cette nouvelle intégrale que le Prince de Venosa aura trop longtemps attendue.
LE DISQUE DU JOUR
Complete Madrigals, Vol. 3
Madrigali a 5 voci, libro 5
Madrigali a 5 voci, libro 6
Les Arts Florissants
Paul Agnew, direction
Un album de 2 CD du label harmonia mundi HAF8905311.12
Acheter l’album sur le site du label harmonia mundi ou sur Amazon.fr – Télécharger ou écouter l’album en haute-définition sur Qobuz.com
Tenebræ Responsoria,
Feria Quinta (Répons des Ténèbres du Jeudi saint)
Les Arts Florissants
Paul Agnew, direction
Un album du label harmonia mundi HAF8905363
Acheter l’album sur le site du label harmonia mundi ou sur Amazon.fr – Télécharger ou écouter l’album en haute-définition sur Qobuz.com
Photo à la une : le chef de chœur Paul Agnew – Photo : © Julien Gazeau