Magnifique le Trio de jeune homme que Josef Suk composa pour ses vingt-sept ans. La mort n’a pas encore assombri son univers, un giocoso s’empare de toute l’œuvre où fusent, à peine masqués, des éléments de la musique populaire morave, l’amitié et l’influence de Dvořák guidant son bras pour écrire une partition dont les Karénine savourent le brio sans ombre.
Pour les ombres, il sera toujours temps avec l’Élégie, sonnet poétique à la mémoire de Julius Zeyer où passent les traits du visage de ce romancier disparu trop tôt, portrait en notes de celui qui raviva les contes de l’ancienne Bohème dans une œuvre littéraire encore trop ignorée en France.
Ténébreux aussi, à sa manière lyrique, le Troisième Trio de Dvořák n’est pas son plus couru. Il regarde vers Brahms certes, mais plus encore porte l’empreinte douloureuse de la mort de la mère du compositeur, qui a fait dévier sa plume vers le mode mineur, confiant au piano subtilement modelé par Paloma Kouider un discours complexe, aux envolées souvent symphoniques.
LE DISQUE DU JOUR
Josef Suk
(1874-1935)
Trio pour violon, violoncelle et piano en ut mineur, Op. 2
Élégie en ré bémol majeur,
Op. 23
Antonín Dvořák
(1841-1904)
Trio pour violon, violoncelle et piano No. 3 en fa mineur,
Op. 65
Trio Karénine
Paloma Kouider, piano
Charlotte Juillard, violon
Louis Rodde, violoncelle
Un album du label Mirare MIR646
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Photo à la une : les membres du Trio Karénine – Photo : © DR