Rare !, Petrouchka, dans la réduction aussi brillante qu’expressive qu’en réalisa Stravinski en bardant d’accents et de bariolages le clavier à quatre mains, ne sacrifie rien du fabuleux orchestre de couleurs et d’épices qu’il y dispensa. Sous les doigts précis et surtout expressifs de David Salmon et Manuel Vieillard, on voit la baraque de foire et le Maure, on entend le limonaire et les fouets des cochets, tout un théâtre de rue jaillit du piano.

C’est le verso d’un disque dont le recto surprend encore plus l’oreille. Magnifiques, purs de traits et pourtant sensuels, les Epigraphes antiques dispensent leur poésie un peu blanche où derrière l’évident panthéisme pas si éloigné des Chansons de Bilitis, un peu de l’esprit du Satie des Gymnopédies se fait entendre.

Pourtant la vraie merveille, et en fait la révélation, sera la plume de Ravel se glissant dans la pamoison érotique du Faune. Cette conjonction si éloquente à force de poésie entre les deux univers ne sacrifie aucun des compositeurs, au contraire, ce que Ravel orne de sensualité, imaginant quasiment un autre orchestre, souligne le ballet immobile qu’y entendait et qu’illustra Nijinski. Au point que l’orchestre de Debussy, et pas davantage la flûte du Faune, ne vous manqueront.

LE DISQUE DU JOUR

Claude Debussy (1862-1918)
6 Épigraphes antiques,
L. 131, CD 139
Prélude à l’après-midi d’un faune, L. 86, CD 87
(version à 4 mains : Ravel)
Igor Stravinski (1882-1971)
Pétrouchka, K 012
(version à 4 mains)

Geister Duo, piano

Un album du label Mirare MIR656
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Photo à la une : les deux pianistes du Geister Duo – Photo : © DR