Subtil, confronter le 6e Concerto, œuvre d’un jeune homme de vingt ans qui voulant montrer d’abord sa virtuosité se laisse gagner par son génie mélodique (écoutez l’Andante !) avec le grand geste du 25e qui proclame un giocoso peint dans un ardent soleil par Kristian Bezuidenhout, c’est montrer l’évolution fulgurante en une décennie du génie mozartien.
Si le pianofortiste fait entendre dans le 6e déjà des prémices de ce que deviendra le langage si singulier des opus qui suivront, comme voyant dans un miroir ce qui va advenir, et ne se contentant pas d’en faire un simple divertissement, quelle ardeur, quel appétit dans le glorieux ut majeur du 25e, que partage la direction rapace de Gottfried von der Goltz.
À eux deux ils nous en offrent une lecture de plein air, d’une fabuleuse vitalité, irrésistible dans l’Allegretto final, avec sa coda en feu d’artifice. Jusque dans l’Andante, transporté par un orchestre empli d’une lumière zénithale, Kristian Bezuidenhout refuse la confidence, chante un vaste air d’opéra, qu’il orne à loisir, pure vocalité où le foisonnement des teintes du McNulty d’après Walter se marie à l’orgue d’épices des bois déployé par les Freiburger, merveille qui fait entendre différemment les lignes et les équilibres.
Décidément les Concertos de Mozart revisités du pianoforte ont de la chance ; comment résister au double plaisir d’y suivre volume après volume – celui de cette série est le quatrième – les gestes si contrastés de Kristian Bezuidenhout et de Robert Levin ?
LE DISQUE DU JOUR
Wolfgang Amadeus Mozart (1756-1791)
Concerto pour clavier et orchestra No. 6 en si bémol majeur, K. 238
Concerto pour clavier et orchestra No. 25 en ut majeur, K. 503
Kristian Bezuidenhout, pianoforte
Freiburger Barockorchester
Gottfried von der Goltz, direction
Un album du label harmonia mundi HMM902333
Acheter l’album sur le site du label XXXX ou sur Amazon.fr ― Télécharger ou écouter l’album en haute-d finition sur Qobuz.com
Photo à la une : le pianiste Kristian Bezuidenhout – Photo : © Marco Borggreve