Un quatuor ? Un cri. Les musiciens du Quatuor Pavel Haas s’emparant de La Jeune fille et la mort y osent un expressionisme où déjà paraissent les abîmes de la Seconde École de Vienne, et surtout un vertigineux récit dramatique qui semble comme à revers des élévations spirituelles des ultimes Quatuors de Beethoven.
Oui, Schubert regardait décidément ailleurs, et il faut l’approche au cordeau des Tchèques, leurs sonorités aiguisées pour en saisir toute la modernité. En somme, poursuivant un même but, ils sont, d’esthétique sonore, à revers de l’opulence symphonique des Berg.
Fascinant, d’ailleurs la même distance d’avec les Viennois paraît dans un Quintette : débuté hors du monde, en sonorités irréelles, archets fins, harmonies étranges, rythmes impondérables, l’Allegro ma non troppo flirte souvent avec le murmure, le jeu arachnéen des cinq amis anticipant le mystère de l’Adagio où un Leiermann se plaint doucement.
Scherzo âpre, parcouru d’appels de clairons et de traits qui fusent ; les archets ardent, ils savoureront jusqu’à une dangereuse ébriété le giocoso de qui ouvre l’Allegretto, avant de chanter le second thème avec d’infinies nuances et de faire entendre cet assombrissement progressif dont la coda, malgré sa violence, ne dissipera pas les ombres méphitiques.
LE DISQUE DU JOUR
Franz Schubert (1797-1828)
Quatuor à cordes No. 14 en ré mineur, D. 810 « La Jeune fille et la mort »
Quintette pour deux violons, alto et deux violoncelles en ut majeur, D. 956
Quatuor Pavel Haas
Danjulo Ishizaka, violoncelle II
Un album du label Supraphon SU4110-2
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Photo à la une : les membres du Quatuor Pavel Haas – Photo : © Petra Hajská