Adam Laloum est un fidèle, le voir retrouver Mi-Sa Yang, la violoniste du Trio Les Esprits, qu’ils avaient formé durant leurs années de prime jeunesse, rappelle à quel point la donne lyrique reste base de leur syntaxe commune.
L’admirable Sonate que Poulenc composa au creux de la Seconde Guerre dans un Paris vert-de-gris, avec pour Madone l’image vivante de Federico García Lorca assassiné à Grenade par la Phalange en 1936, file, alerte, et nostalgique à la fois, merveilleuse de tendresse amusée dans l’échappée belle du Final, entre songes noirs et songes azurés, assurément une des plus pertinentes versions qu’ait connue l’œuvre : écoutez la sinistre coda du même Final, lorsque le tragique s’invite : l’archet crisse, le clavier effondre, les masques tombent.
Les Mélodies de Prokofiev en son temps d’Amérique – qu’il écrivit pour sa compatriote ukrainienne Nina Koshetz et que Paul Kochanski ravît dans la chanterelle de son violon, sont merveilleuses jusqu’à l’étrange, pesées divines entre archet et clavier. Le Divertimento de Stravinsky, son Tchaikovski réinventé, leur inspire tout un monde onirique jusque dans les Danses Suisses : ce que Samuel Dushkin abrasait, Mi-Sa Yang le caresse, merveille !, qui atteindra à l’apesanteur dans les caprices, les « flûteries », les langueurs de chat de la Sonate de Debussy où tout gagne à cette suggestion qui est l’âme des trois poèmes où l’on croit entendre sous l’archet la syrinx du Faune.
LE DISQUE DU JOUR
Francis Poulenc (1899-1963)
Sonate pour violon et piano, FP 119
Sergei Prokofiev (1891-1953)
5 Mélodies pour violon et piano, Op. 35bis
Igor Stravinsky (1882-1971)
Divertimento pour violon et piano
Claude Debussy (1862-1918)
Sonate pour violon et piano, CD 148
Mi-Sa Yang, violon
Adam Laloum, piano
Un album du label Mirare MIR586
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Photo à la une : la violoniste Mi-Sa Yang et le pianiste Adam Laloum – Photo : © Milena & Gilles Le Mao