En 2016, dans son atelier de Brême, Christian Kuhlmann terminait son nouveau clavecin, inspiré à la fois par le sublime Hemsch détenu par Frédérick Haas, et par les instruments de son mentor, Antoine Vater : il ajoutait une deuxième table d’harmonie, rétractable pour qui voudrait retrouver la sonorité un rien roide des clavecins d’origine.
Abordant enfin un cycle majeur de Bach, Giulia Nuti conserve les deux tables, aigus de vermeille, polyphonies claires et pleines, comme ce clavecin danse et parle sous les doigts de cette impeccable musicienne dont l’éclatante virtuosité m’avait transporté dès son premier disque consacré aux clavecinistes de la Révolution française (deutsche harmonia mundi, avec un spectaculaire Tapray revisitant Les Indes galantes, cherchez-le !).
La lumière qu’elle met aux Partitas n’en évacue jamais la nostalgie solaire comme les audaces harmoniques : sa Sixième est d’anthologie, la Première, chantée avec des subtilités qui animent les lignes sans les détendre ayant d’emblée tout dit d’un cycle revisité de A à Z, sa vision si aboutie culminant dans la Quatrième, lyrique et pourtant alerte, si émouvante : écoutez la dire l’immense Sarabande.
Cet album célèbre les noces d’une interprète historiquement informée qui choisit ses points de vue pour mieux servir la poésie (les ornements sont parfois pris à ceux notés dans la copie de Müthel) et d’un instrument splendide qui irait aux Suites anglaises ou aux Suites françaises. En les espérant, savourez ces six merveilles, admirablement captées par Renate Wolter-Seevens.
LE DISQUE DU JOUR
Johann Sebastian Bach (1685-1750)
Les 6 Partitas pour clavier (Intégrale)
No. 1 en si bémol majeur, BWV 825
No. 2 en ut mineur, BWV 826
No. 6 en mi mineur, BWV 830
No. 4 en ré majeur, BWV 828
No. 3 en la mineur, BWV 827
No. 5 en sol majeur, BWV 829
Giulia Nuti, clavecin
Un album de 2 CD du label Arcana A557
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Photo à la une : la claveciniste Giulia Nuti – Photo : © Daniele Caminiti