Plus de dix ans pour revenir à Schubert ! Le temps, après un Quintette à deux violoncelles orchestral, après une Jeune fille et la mort si étrange, d’apprivoiser les abîmes du Quinzième Quatuor.
Les quatre archets semblent toujours au bord d’un gouffre dans leur lecture dont les suspensions lunaires rendent la syntaxe de Schubert si moderne. La pure beauté des timbres, l’opulence jusque dans le dolce, les phrasés à la limite du silence, les hallucinations retenues, précises voudrais-je écrire, transfigurent cet univers où tant se seront engagés avec furia.
Pas les Takács. Tout est pensé, pesé, et soudain ce Quatuor devient, par-delà même sa stature symphonique, un monde qui n’aura son égal qu’en Winterreise. Un Leiermann esseulé y distille ses pizzicatos, toute une lyrique de l’abandon parcourt les deux premiers mouvements, et jusque dans l’Allegro final, dont le souffle semble comme bridé, le sentiment de la mort ne desserrera pas son emprise.
Merveille, le bien moins couru 8e Quatuor chante dans une plénitude de tendresse, dans des élans encore très Sturm und Drang, plus entendus depuis les Melos, c’est dire. Faudra-t-il encore attendre dix ans ?
LE DISQUE DU JOUR
Franz Schubert (1797-1828)
Quatuor à cordes No. 15 en
sol majeur, D. 887
Quatuor à cordes No. 8 en
si bémol majeur, D. 112
Takács Quartet
Un album du label Hypérion Records CDA68423
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Photo à la une : les membres du Quatuor Takács –
Photo : © Amanda Tipton