Premier visage

Le mahlérien tant fêté aurait-il à jamais fait oublier quel brucknérien d’importance fut (et reste) Eliahu Inbal ? Une saisissante lecture de la 8e Symphonie captée dans la belle acoustique de la Beethovensaal de Stuttgart les 1er et 2 octobre 2015 vient rappeler à notre mémoire la prodigieuse intégrale des neuf Symphonies qu’il enregistra pour Teldec avec son orchestre de Francfort. Il y osait les premières gravures des versions originales, produisant une révolution passée un peu inaperçue hors d’Allemagne, et restera fidèle à celles-ci.

Fabuleuse, la 8e de Stuttgart l’est autant par l’excellence de l’exécution que par une inspiration que les années auront augmentée. Eliahu Inbal accepte toutes les singularités, le ton brut, les abrasions vertigineuses de ce geste princeps, saisissant dès l’Allegro moderato. Si l’oreille est sans cesse surprise par ces audaces que la version définitive se sera employée à minimiser, c’est d’abord l’inspiration fulgurante d’un geste quasi démiurgique qui saisit : écoutez seulement le Finale, emporté en pure gloire.

La Septième pose moins de questions, Eliahu Inbal s’émerveille de sa perfection, fait chanter les cordes, dirige alerte, tout cela dans une lumière qui rappelle les allégements séraphiques qu’y osait Karl Böhm. Les rapprocher pourra sembler étrange ; par-delà les générations Bruckner les réunit.

LE DISQUE DU JOUR

Anton Bruckner (1824-1896)
Symphonie No. 7 en mi majeur, WAB 107 (version 1885)
Symphonie No. 8 en ut mineur, WAB 108 (version originale, 1887)

Radio-Sinfonieorchester Stuttgart des SWR
Eliahu Inbal, direction

Un album de 2 CD du label SWR Music SWR19152CD
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Photo à la une : le jeune Eliahu Inbal, à Paris, dans les années 1970 – Photo : © DR