Boréades

Quel grand écart entre les images ourlées de révérences baroques de la Suite Holberg de Grieg et l’atelier radical des trois Pièces, Op. 59 qui prouvent que Carl Nielsen inventa autant à son piano que devant son orchestre.

De cet ambitus vertigineux, Jean-Baptiste Doulcet, dans son clavier limpide, rend toutes les nuances avec un art certain, d’abord dans les rares estampes naturalistes que sont les cinq vignettes de Puursaja, portraits d’arbres, échos sonores de ramures, d’écorces sous le vent. Ces trésors de poésie demandent un aède qui sait suggérer, pari gagné par ce piano avide de timbres et de couleurs qui magnifie les Impromptus, Op. 5 et donne envie d’entendre sous les doigts du jeune homme d’autres opus de Sibelius : son corpus pianistique est d’importance, les perles y abondent, restées si méconnues malgré Glenn Gould.

Vertige disais-je ? Passer de la troisième pièce de l’Opus 59Carl Nielsen éparpille le clavier comme le fera Ligeti, à ce chef-d’œuvre secret qu’est la BalladeGrieg dissimule un vaste cahier de variations peut en effet donner le tournis.

La sombre lyrique que distille Jean-Baptiste Doulcet au long de ces pages aventureuses va au cœur de ce chef-d’œuvre dont peu auront saisi le caractère introspectif, l’écriture en creux qui trouve au-delà de la perfection formelle un imaginaire de contes pas si loin de ceux qu’inventera Nikolaï Medtner.

LE DISQUE DU JOUR

Edvard Grieg (1843-1907)
Suite pour piano
dans le style ancien, Op. 40
« Holberg Suite »

Ballade en sol mineur,
Op. 24

Jean Sibelius (1865-1957)
6 Impromptus, Op. 5
Puusarja (Les arbres),
Op. 75

Carl Nielsen (1865-1931)
Drømmen om « Glade Jul » (Rêve sur « Douce nuit »), CNW 85
3 Klaverstykker (Pièces pour piano), Op. 59

Jean-Baptiste Doulcet, piano

Un album du label Mirare MIR722
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Photo à la une : le pianiste Jean-Baptiste Doulcet – Photo : © DR