Florent Schmitt avait loué son Quatuor composé sous le regard attentif de Nadia Boulanger, qu’aurait-il pensé de ces Vingt-quatre Préludes écrits en 1945 par un adolescent de quinze ans qui n’avait pas encore quitté son archipel ?
Le cycle s’entend comme se verrait des estampes d’Hokusai, paysages, scène grotesque, sujet fantasmagorique, impressions mystérieuses, tout un petit Japon idéal enfermé dans le piano par un gamin qui découvrait Debussy en écoutant son transistor. Mao Fujita a eu raison d’enregistrer ces opus qu’il aura travaillés avec le concours de la veuve du compositeur, il éclaire l’alpha d’un compositeur majeur trop tôt disparu. Se risquera-t-il un jour à enregistrer son Concerto pour piano ?
L’art de coloriste du jeune homme fait autant merveille pour une recréation toute poétique des Préludes de Chopin, délivrée des visions et des tensions qui font le cahier d’habitude si noir. Mao Fujita préfère le chant qu’il déploie avec d’infinies subtilités (l’Allegretto, joué dans un rubato magique), sans une once de sentimentalité, et aux tonnerres virtuoses une introspection qui rappelle que Chopin y tint son journal de Valdemossa.
Splendides les Scriabine, fabuleux d’éclairages qui rasent, d’apartés fantomatiques, de replis sensuels, splénétiques et ailés à la fois, merveilles pas si éloignées que cela des gemmes où Sofronitzki ajoutait juste une pincée de soufre en plus.
LE DISQUE DU JOUR
Frédéric Chopin (1810-1849)
24 Préludes, Op. 28
Alexandre Scriabine
(1872-1915)
24 Préludes, Op. 11
Akio Yashiro (1929-1976)
24 Préludes
Mao Fujita, piano
Un album de 2 CD du label Sony Classical 198028257622
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Photo à la une : le pianiste Mao Fujita – Photo : © Dovile Sermokas