« The Bel Canto Violin » proclament les disques de cette série – en fait une intégrale de tout ce que ce violoniste anglais aura enregistré pour Decca et L’Oiseau-Lyre. Comme c’est vrai ! Campoli – abandonnez vous aussi le prénom, les Londoniens ne l’appelaient affectueusement que par son patronyme – né à Rome en 1906 dans une famille de musiciens (sa mère Elvira donnait la réplique à Caruso, rien moins), eut un violon dans les mains comme d’autres un ours en peluche : son père, premier violon à la Santa Cecilia, fut son seul professeur. Les Campoli s’installent en Angleterre en 1911, vingt ans plus tard ce gamin de dix ans médusait le tout Londres musical en jouant le Concerto de Mendelssohn : il rafle le Prix de la Ville au ravissement de tous.
Sa légende était née, quelques années plus tard il faisait ses débuts professionnels au Wigmore Hall, Melba entendant sa sonorité dorée, son timbre de voix humaine, lui demande de jouer avec elle, deux voix qui s’apparient dans un répertoire de fantaisie dont Campoli fera son miel, créant un ensemble de musique de divertissement, le Salon Orchestra, qui l’éloignera des salles de concert jusqu’à la fin de la Seconde Guerre mondiale. Mais Campoli n’avait pas oublié le grand répertoire, engrangeant pour la BBC un nombre considérable de bandes jamais diffusées : resté citoyen italien, il ne pouvait officiellement collaborer avec une institution publique. Espérons qu’elles seront publiées in extenso (si elles n’ont pas disparu).
En 1950, l’avènement du microsillon verra Decca confirmer le contrat privilégié obtenu à la fin du 78 tours : carte blanche pour le répertoire et les partenaires. Il choisira Josef Krips pour le Beethoven, parfaitement classique, Van Beinum pour le Mendelssohn et une Symphonie espagnole d’un chic fou, Argenta pour un Tchaikovski très ballade, Boult évidemment pour Elgar, Bruch et encore Mendelssohn, Bliss lui dirigeant le concerto écrit à son intention, Fistoulari pour les pièces de charme du répertoire français, tout un ensemble de concertos captés à Londres, qui conserve sa sonorité chaleureuse, son geste mesuré et élégant : ils rayonnent intact malgré les années au long des différents disques assemblés dans cette réédition exemplaire.
Cette sonorité est d’une beauté !, les phrasés si singuliers sont ceux d’un chanteur : hors les grands concertos romantiques (quel dommage, il n’a pas enregistré le Brahms) et le répertoire baroque, ciselé, joué avec des tendresses déconcertantes, ce sont les pièces de charme et de virtuosité qui montre le raffinement de son art, la sureté de son goût, l’intonation toujours parfaite même dans les albums tardifs pour L’Oiseau-Lyre où le grain si singulier de son cher Rocca est capturé au mieux (écoutez les Danses espagnoles de Sarasate, ces registres stupéfiants !).
Si les mélomanes anglais gardent toujours une certaine tendresse pour l’art de ce violoniste si poétique, le reste de l’Europe l’a totalement oublié, découvrez-le toute affaire cessante. En 2018, Cyrus Meher-Homji avait réédité l’intégralité de ses diverses publications Eloquence, six double albums que surclasse cette nouvelle édition reprenant pour une grande part les disques dans leurs couplages princeps et avec les pochettes originales. Si vous n’avez pas pu vous procurer l’ancienne mouture, n’hésitez pas.
LE DISQUE DU JOUR
Alfredo Campoli
The Bel Canto Violin
CD 1. The Decca 78s
Œuvres de Albéniz, Drigo, Drdla, Kreisler, Elgar, Bazzini, H. Fisher, T. Lieurance, Lehár, F. K. Logan, Queen Liliʻuokalani, Paderewski, Mozskowski, Chaminade, Saint-Saëns, Schumann & Friml (1931, 1932, 1933, 1934)
Harold Pedlar, piano – Sidney Crooke, piano – Cedric Sharpe, violoncelle – Olive Groves, soprano
CD 2. The Decca 78s
Œuvres de Haendel, Monti, Kreisler, Hubay, Heuberger, Poliakin, Hahn, Hartley, Raff, Chopin, Järnefelt, Foster, Grainger, Gossec, et Schumann.
Traditionals.
(1934, 1935, 1940)
Sidney Crooke, piano – Welbeck Light String Quartet
CD 3. The Decca 78s
Œuvres de Heykens, J. Strauss II, Kálmán, Oscar Straus, Waldteufel, Chabrier, Romberg, Holst, Offenbach, Chopin, Mendelssohn, Liszt, Herbert, Fibich, Poldini, Lehár, Friml.
Traditionals.
(1931, 1932)
Dorchester Hotel Orchestra – His Salon Orchestra
CD 4. The Decca 78s
Œuvres de Puccini, Herbert, Elgar, A. Rubinstein, Mendelssohn, Saint-Saëns, Nevin, Coates, Gounod, Wagner, Verdi, Bizet, Meyerbeer, Liszt, Schubert, Chopin, Rossini, Tchaikovski, Raff. et D’Ambrosio (1933, 1934, 1935)
His Salon Orchestra
CD 5. The Decca 78s
Giuseppe Tartini (1692-1770)
Sonate pour violon et basse continue en sol mineur, GT 2.g10 « Didone abbandonata »
Johann Sebastian Bach (1685-1750)
Concerto pour clavier No. 5 en fa mineur, BWV 1056 (extrait : II. Largo ; arr. pour violon et piano : Franco)
Ouverture No. 3 en ré majeur, BWV 1068 (extrait : II. Air ; arr. pour violon et piano)
Niccolò Paganini (1782-1840)
Caprice No. 13 en si bémol majeur « Le rire du diable » (version pour violon et piano : Kreisler)
Caprice No. 20 en ré majeur (version pour violon et piano : Kreisler)
La campanella (No. 3, extrait du « Concerto pour violon et orchestre No. 2, Op. 7 » ; version pour violon et piano : Kreisler)
Concerto pour violon et orchestre No. 1 en ré majeur, Op. 6* (version en un mouvement élaborée par Kreisler)
Arcangelo Corelli (1653-1713)
Sonate pour violon et basse continue en ré mineur, Op. 5 No. 12 « La Folia »
Eric Gritton, piano – *National Symphony Orchestra – *Victor Olof, direction
CD 6. The Decca 78s
Œuvres de Bazzini, Hubay, Hummel, Debussy (1948)
Arcangelo Corelli (1653-1713)
Sonate pour violon et basse continue en ré mineur, Op. 5 No. 7 (extrait : III. Sarabanda ; version pour violon et piano : Moffat)
Johann Sebastian Bach (1685-1750)
Partita pour violon seul No. 2 en ré mineur, BWV 1004 (1948)
Giuseppe Tartini (1692-1770)
Sonate pour violon et basse continue en sol mineur, GT 2.g05 « Le trille du diable » (1949)
Eric Gritton, piano
CD 7
Œuvres de Poulenc, Albéniz, Tartini, Ravel, Brahms, Massenet, Chopin et Mozart (1951, 1952, 1950, 1949)
Eric Gritton, piano
Felix Mendelssohn-Bartholdy (1809-1847)
Concerto pour violon No. 2 en mi mineur, Op. 64
London Philharmonic Orchestra – Eduard van Beinum, direction (1949)
CD 8
Ludwig van Beethoven (1770-1827)
Concerto pour violon en ré majeur, Op. 61
London Symphony Orchestra – Josef Krips, direction (1952)
CD 9
Georg Friedrich Händel (1685-1759)
Sonate pour violon et basse continue en la majeur, HWV 361
Sonate pour violon et basse continue en sol mineur, HWV 368
Sonate pour violon et basse continue en fa majeur, HWV 370
Sonate pour violon et basse continue en ré majeur, HWV 371
Sonate pour violon et basse continue en la majeur, HWV 372
Sonate pour violon et basse continue en mi majeur, HWV 373
George Malcolm, clavecin (1953)
CD 10
Édouard Lalo (1823-1892)
Symphonie espagnole en ré mineur, Op. 21
London Philharmonic Orchestra – Eduard van Beinum, direction (1953)
Camille Saint-Saëns (1835-1921)
Introduction et Rondo Capriccioso, Op. 28
Havanaise, Op. 83
London Symphony Orchestra – Anatole Fistoulari, direction (1954)
CD 11
Ernő Dohnányi (1877-1960)
Ruralia hungarica, Op. 32c – Suite en 3 mouvements pour violon et piano
Niccolò Paganini (1782-1840)
Caprice No. 13 en si bémol majeur « Le rire du diable » (version pour violon et piano : Kreisler)
Caprice No. 20 en ré majeur (version pour violon et piano : Kreisler)
La campanella (No. 3, extrait du « Concerto pour violon et orchestre No. 2, Op. 7 » ; version pour violon et piano : Kreisler)
George Malcolm, piano (1953)
Œuvres de Albéniz, Debussy, Drdla, Drigo, Elgar, Fibich, Fiocco, Foster, S. Gardner, Heuberger, Mendelssohn, Ponce, François Schubert. Versions pour violon et piano
Eric Gritton, piano (1955, 1956)
CD 12. Homage to Fritz Kreisler
Œuvres de Kreisler, Paderewski, Wieniawski, Granados et Tartini. Œuvres non originales dans des arrangements pour violon et piano de Kreisler.
Eric Gritton, piano (1955)
CD 13
Sir Edward Elgar (1857-1934)
Concerto pour violon en si mineur, Op. 61
London Philharmonic Orchestra – Sir Adrian Boult, direction (1955)
CD 14
Giuseppe Tartini (1692-1770)
Sonate pour violon et basse continue en sol mineur, GT 2.g05
« Le trille du diable »
Sonate pour violon et basse continue en sol mineur, GT 2.g10
« Didone abbandonata »
George Malcolm, piano (1955)
Max Bruch (1838-1920)
Concerto pour violon No. 1 en sol mineur, Op. 26
New Symphony Orchestra of London – Royalton Kisch, direction (1951)
CD 15
Sir Arthur Bliss (1891-1975)
Concerto pour violon, F. 111
Thème et Cadenza pour violon et orchestre, F. 120
London Philharmonic Orchestra – Sir Arthur Bliss, direction (1956)
CD 16
Camille Saint-Saëns (1835-1921)
Concerto pour violon et orchestre No. 3 en si mineur, Op. 61
Fritz Kreisler (1875-1962)
Concerto pour violon et orchestre en un seul mouvement (d’après Paganini, Concerto No. 1, Op. 6)
Henryk Wieniawski (1835-1880)
Légende, Op. 17
Pablo de Sarasate (1844-1908)
Zigeunerweisen, Op. 20
London Symphony Orchestra – Piero Gamba, direction (1972)
CD 17
Piotr Ilitch Tchaïkovski (1840-1893)
Concerto pour violon en rémajeur, Op. 35
London Symphony Orchestra – Ataúlfo Argenta, direction (1957)
Le Lac des cygnes, Op. 20, TH 12 (2 extraits : No. 13b. Danse des cygnes. Moderato ; Pas de deux. Introduction – Variations I & II – Coda)
London Symphony Orchestra – Anatole Fistoulari, direction (1952)
CD 18
Felix Mendelssohn-Bartholdy (1809-1847)
Concerto pour violon et orchestre No. 2 en mi mineur, Op. 64
Max Bruch (1838-1920)
Fantaisie écossaise, Op. 46
London Philharmonic Orchestra – Sir Adrian Boult, direction (1959)
CD 19. Campoli Encores
Œuvres de Albéniz, Bazzini, Brahms, Kosaku Yamada, Bach, Schubert, Paganini/Kreisler, Mozart
Norihiko Wada, piano (1971)
CD 20
Pablo de Sarasate (1844-1908)
2 Danzas Españolas, Op. 21
2 Danzas Españolas, Op. 22
2 Danzas Españolas, Op. 23
2 Danzas Españolas, Op. 26
Navarra, pour 2 violons, Op. 33*
Daphne Ibbott, piano – *Belinda Bunt, second violon (1977)
CD 21
Henryk Wieniawski (1835-1880). Musique pour violon et piano
Polonaise No. 1 en ré majeur, Op. 4
Légende, Op. 17
2 Mazurkas, Op. 19
Souvenir de Moscou, Op. 6
Scherzo-Tarantelle, Op. 16
Capriccio-Valse, Op. 7
Polonaise brillante No. 2 en la majeur, Op. 21
Concerto pour violon et orchestre No. 2 en ré mineur, Op. 22 (extrait : II. Romance ; version pour violon et piano)
Daphne Ibbott, piano (1980)
Un coffret de 21 CD du label Decca 4846278 (Collection Eloquence Australia)
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Photo à la une : le visuel d’un des LP parus dans les années 1950, ici la première partie du CD 11 – Photo : © DR