Il aura fallu attendre le XXIe siècle pour tenir une intégrale des Symphonies de Bruckner par les Wiener Philharmoniker : c’est avec eux finalement que Christian Thielemann gravera parallèlement ses deux cycles, pour l’image (C Major) puis pour le seul son (Sony). Et un étonnement : que les Wiener Symphoniker, très tôt, aient eux gravé les neuf Symphonies sous la baguette de Volkmar Andreae pour Amadeo, volant longtemps la vedette à leurs glorieux confrères.
Deutsche Grammophon répond par un assemblage qui pourra étonner. Une seule faille réelle, la Deuxième en concert selon Riccardo Muti, étrangement alentie et assez atone, choix pour faire glamour car Universal avait dans son relativement abondant catalogue Bruckner une des plus belle Deuxième de la discographie, justement avec les Philharmoniker et Horst Stein. Heureusement, leur Sixième est bien là (seule gravure des Viennois pour les divers catalogue d’Universal), au même degré d’inspiration, et fait regretter que Decca n’ait pas confié les autres symphonies à ce duo parfait.
Les surprises seront où on ne les attend pas : une Cinquième élancée, épurée, sans aucune froideur pourtant, rappelle que Lorin Maazel ne se fourvoya jamais chez Bruckner. Pierre Boulez arde les Viennois pour une Huitième passionnante de bout en bout, qui fera mentir une fois de plus sa réputation d’objectivité, la Première selon Claudio Abbado demeure parmi ses plus beaux disques, et comment ne pas être débordé par l’intensité du geste de Bernard Haitink au long d’une Troisième quasi mystique.
La Romantique de Karl Böhm est demeurée éternelle, vaste ballade carinthienne. L’ultime Septième de Karajan le vaisseau de Tristan et Isolde plongé dans la nuit, Carlo Maria Giulini fait passer la Neuvième de l’autre côté du miroir, achevant un voyage instructif, qui aurait gagné à ajouter quelques gravures historiques : la Neuvième selon le jeune Zubin Mehta, plus en amont la triade (3, 4, 5) imparfaite mais souvent fulgurante signée par Hans Knappertsbusch, témoin d’une autre époque, encore peu concernée par l’Urtext, mais Bruckner au disque c’est aussi cela.
LE DISQUE DU JOUR
CD 1
Symphonie No. 1 en ut mineur, WAB 101
Wiener Philharmoniker – Claudio Abbado, direction
CD 2
Symphonie No. 2 en ut mineur, WAB 102
Wiener Philharmoniker – Riccardo Muti, direction
CD 3
Symphonie No. 3 en ré mineur, WAB 103
Wiener Philharmoniker – Bernard Haitink, direction
CD 4
Symphonie No. 4 en mi bémol majeur, WAB 104 « Romantique »
Wiener Philharmoniker – Karl Böhm, direction
CD 5
Symphonie No. 5 en si bémol majeur, WAB 105
Wiener Philharmoniker – Lorin Maazel, direction
CD 6
Symphonie No. 6 en la majeur, WAB 106
Wiener Philharmoniker – Horst Stein, direction
CD 7
Symphonie No. 7 en mi majeur, WAB 107
Wiener Philharmoniker – Herbert von Karajan, direction
CD 8
Symphonie No. 8 en ut mineur, WAB 108
Wiener Philharmoniker – Pierre Boulez, direction
CD 9
Symphonie No. 9 en ré mineur, WAB 109
Wiener Philharmoniker – Carlo Maria Giulini, direction
Un coffret de 9 CD du label Deutsche Grammophon 4845606
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Photo à la une : © DR