Le 3 novembre 1936, Rudolf Serkin gravait pour His Master’s Voice dans le Studio 1 d’Abbey Road les onze faces d’une Appassionata qui aura posé un modèle pour toutes celles à venir. L’élan des phrasés, la pureté du style, l’intensité de l’expression auront pourtant fait un rien oublier à quel point ce piano, capable pourtant d’ascèse, était naturellement beau, sonorité pleine mais précise où tous les registres de l’instrument entrent en résonnance.
Le report si soigné proposé par Mark Obert-Thorn rend justice à cette gravure illustre, et rétablit un accord qui manquait jusque-là à toutes les autres éditions. Ce serait déjà suffisant pour saluer un disque majeur, mais s’y ajoute un Concerto de Schumann resté inédit et capté le 19 octobre de la même année au Queen’s Hall. Miracle par l’absolu classicisme de sa conception, l’élan du Finale qui ne se sépare jamais d’une fantaisie un peu inquiète et assume le côté expansif de l’œuvre. Hamilton Harty devait diriger ce concert, Julius Harrison le remplaça au pied levé, que de caractère dans sa direction !
Au centre du disque, une rare captation d’un fragment du Presto de la 2e Sonate pour violon de Busoni et de l’intégralité de son Finale, emmené avec superbe par Serkin et Adolf Busch, écho de leur œuvre pour la musique de leur temps, document révélé lui aussi pour la première fois.
LE DISQUE DU JOUR
Rudolf Serkin
Early & Unpublished Recordings, 1936-40
Robert Schumann
(1810-1856)
Concerto pour piano et orchestre en la mineur, Op. 54
Ludwig van Beethoven (1770-1827)
Sonate pour piano No. 23
en fa mineur, Op. 57 “Appassionata”
Ferrucio Busoni (1866-1924)
Sonate pour violon et piano No. 2 en mi mineur, Op. 36a, BV 244 (extraits)
Rudolf Serkin, piano
Adolf Busch, violon
London Philharmonic Orchestra
Julius Harrison, direction
Un album du label Pristine Audio PAKM077
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Photo à la une : Le pianiste Rudolf Serkin, en 1962 – Photo : © DR