On l’a trop oublié, Marius-François Gaillard fut le pionnier absolu du piano de Debussy au disque, mieux !, il aura avant tout autre, Alfred Cortot y compris, joué son Debussy objectif, avec une attention à l’exactitude des textes, une réflexion sur les tempos et les phrasés qui auront délivré une interprétation mémorable de Pour le piano, mètre-étalon autant pour la perfection digitale que pour le discours poétique.

Pourtant, ses nombreuses faces Debussy, très bien captées par Odeon, où son splendide Erard résonne de couleurs (écoutez la fantaisie qui parcourt le Menuet de la Suite bergamasque) risquaient bien de rester dans les oubliettes. Les voilà sauvées grâce à Arbiter qui en offre un CD plein à ras bords, ajout essentiel à toute discothèque Debussy en cette année du centenaire.

Arbiter ajoute un second CD, avec les très rares gravures qu’Irén Marik consacra à Debussy au début des années trente, grande pianiste qui jouait serré, colorait les textes à plein, en vrai élève de Bartók : écoutez sa Puerta del Vino ou, bien plus tard, En blanc et noir avec John Ranck.

Mais ce n’est pas tout : Horszowski chez lui dans Children’s Corner, magicien caressant son piano, les Ariettes oubliées (Debussy est au piano !) et la chanson de Mélisande dans la tour selon Mary Garden.

L’ultime plage confine au génie. Qui joue ainsi le mystères de Pour les sonorités opposées, gong tragique ? Marie-Thérèse Fourneau, l’une des plus grandes pianistes françaises oubliée hélas ! Si Allan Evans pouvait pour Arbiter la tirer de ce délaissement, nous rendre ses trop rares disques !

LE DISQUE DU JOUR

Debussy’s Traces

Claude Debussy (1862-1918)
Valse romantique, L. 79
2 Arabesques, L. 74
Ballade (slave), L. 78
Mazurka, L. 75
Suite bergamasque, L. 82 (3 extraits : I. Prélude, II. Menuet, III. Clair de lune)
Pour le piano, L. 95
Masques, L. 110
Estampes, L. 108
Images, Livre I, L. 105 (extrait : I. Reflets dans l’eau)
Rêverie, L. 76
La plus que lente, L. 128
Préludes, Livre I, L. 125 (5 extraits : Nos. 1, 8, 9, 10, 12)
Préludes, Livre II, L. 131 (5 extraits : Nos. 3, 6, 8, 9)
Estampes, L. 108 (2 extraits : I. Pagodes, II. La soirée dans Grenade)
Marius-François Gaillard, piano

Des pas sur la neige (No. 6, extrait des « Préludes, Livre I, L. 125 »)
Les fées sont d’exquises danseuses (No. 4, extrait des « Préludes, Livre II, L. 131 »)
Irén Marik, piano

Children’s Corner, L. 119
Mieczysław Horszowski, piano

Ariettes oubliées, L. 63 (3 extraits : II. Il pleure dans mon cœur, III. L’ombre des arbres, V. Aquarelles I. Green)
Pelléas et Mélisande, L. 93 (extrait : Acte III, Scène 1, début : « Mes longs cheveux descendent jusqu’au seuil de la tour »)
Mary Garden, soprano
Claude Debussy, piano

En blanc et noir, L. 142
Irén Marik, piano I
John Ranck, piano II

Pour les sonorités opposées (No. 10, des « 12 Etudes, L. 143 »)
Marie-Thérèse Fourneau, piano

Un album du label Arbiter 166
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Photo à la une : © BnF