Première publication je crois bien : Fricsay sans son orchestre de la RIAS mais toujours aussi inventif et surtout poète : cette ouverture du Voyage à Reims sur les pointes, filant une douce ironie est un régal qui nous rappelle à quel point Rossini lui parlait : à un moment où plus personne ne donnait son Stabat Mater, il l’exhumait des bibliothèques.
Ce concert donné à la Villa Berg de Stuttgart le 10 octobre 1955 est surprenant : des pièces courtes, dont le fil conducteur pourrait être l’humeur. Le tout jeune Bernd Alois Zimmermann y voit son Caboclo d’Alagoana emporté par un vent de folie voisiner avec la Burleske de Strauss, toujours avec la fidèle Margrit Weber, un peu moins précise qu’à Berlin mais plus fantasque et qui se risque aussi au rare Concertino d’Honegger, joyeux comme un Raoul Dufy. Fricsay était chez lui partout, et aussi dans la musique française : le Boléro preste et cambré qui conclut la soirée le rappelle assez.
Mais il faut l’avouer, l’alchimie de ce concert formidable où les musiciens de l’Orchestre de la Süddeutschen Rundfunks sont littéralement transportés dans l’univers sonore du chef hongrois – ses cordes en soie, ses bois résineux, ses cuivres magiciens – se réalise pleinement dans des Danses de Galánta où même le brio se teinte d’une poésie légère, un rien automnale. Magique.
LE DISQUE DU JOUR
Gioacchino Rossini (1792-1868)
Il viaggio a Reims (Le Voyage à Reims) – Ouverture
Richard Strauss (1864-1949)
Burleske pour piano et orchestre en ré mineur, TrV 145
Zoltán Kodály (1882-1967)
Danses de Galánta
Bernd Alois Zimmermann (1918-1970)
Caboclo (No. 4, extrait des “Alagoana (Caprichos Brasileiros)”
Arthur Honegger (1892-1955)
Concertino pour piano et orchestre, H. 55
Maurice Ravel (1875-1937)
Boléro, M. 81
Margrit Weber, piano
Sinfonieorchester des Süddeutschen Rundfunks (SWR Symphonieorchester Baden-Baden und Freiburg)
Ferenc Fricsay, direction
Un album du label SWR Classic SMR19070CD
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Photo à la une : le chef d’orchestre Ferenc Fricsay – Photo : © Max Jacoby/Deutsche Grammophon