Le Concerto en sol, Boléro, tout Daphnis, la discographie ravélienne de Riccardo Chailly tenait dans un mouchoir de poche, on ne regrettera pas de la voir s’étoffer enfin.
Raffinées, élégantes, juste sulfureuses comme il le faut, ses Valses nobles et sentimentales font entendre des détails que seuls les virtuoses de l’Orchestre du Festival de Lucerne peuvent faire émaner dans l’opulence du trait général. L’endormissement du cycle, avec son effeuillage de thèmes fantômes, fait regretter qu’ensemble ils n’aient pas inscrit au même concert la Rapsodie espagnole.
Mais ils auront préféré demeurer dans le sujet chorégraphique. Les fragments de Daphnis et Chloé (en fait les deux Suites comme les dirigeait souvent Sergiu Celibidache) sont fascinantes par le contrôle des dynamiques, les sonorités naturalistes, la transcendante poésie d’orchestre qui nous vaut le plus beau Lever de soleil depuis celui de Cluytens, absolument irréel.
La Valse, fuligineuse, instable, dangereuse, plus angoissée que voluptueuse, montre l’orchestre combattant contre ses sonorités naturellement capiteuses, et Chailly menant la danse au bord du volcan avec cette élégance un peu ivre irrésistible : le voir, c’est l’entendre. Boléro vif, solaire, droit, qui appelle la chorégraphie et, vous vous en doutez, un festival de solos invraisemblables.
Puisse Riccardo Chailly revenir à Ravel, mais aussi à Debussy, voire Roussel, les raffinements de son art l’y destinent.
LE DISQUE DU JOUR
Maurice Ravel (1875-1937)
Valses nobles et sentimentales, M. 61a
Daphnis et Chloé – Suite No. 1, M. 57a
Daphnis et Chloé – Suite No. 2, M. 57b
La Valse, M. 72
Boléro, M. 81
Orchestre du Festival de Lucerne
Riccardo Chailly, direction
Un DVD/Blu-Ray du label Accentus ACC20451
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Photo à la une : le chef d’orchestre Riccardo Chailly – Photo : © Priska Ketterer / Lucerne Festival