Apaisé le dernier Brahms ? Hortense Cartier-Bresson, empoignant son Steinway, répond non. Appassionato plutôt, si j’en crois son clavier chenu, ses sonorités boisées où grondent des orages : ses Fantaisies, Op. 116 ont cette puissance de l’inexorable, elles sont aussi très peu écoutées, aucun narcissisme ici, mais une ardeur sombre qui décante le chant jusqu’à le perdre, nuit de notes sans étoiles.
Cette pianiste trop rare – je me souviens de son album Bartók si radical – est décidément chez elle dans ses cahiers au fond modernistes, ce qu’elle entend en diffractant les harmonies, en ouvrant les espaces intérieurs des Intermezzi, Op. 117, études de sonorités aux moires inquiétantes. Quel toucher dans la profondeur de l’instrument, quelles respirations plus fébriles qu’apaisées.
Pour les gestes si contrastés de l’Opus 118, tout sonne simple, évident, c’est que le jeu à dix doigts fait entendre les lacis ténébreux des polyphonies que la main gauche contre-chante, parole plus que musique tant l’esprit du lied s’infuse au long du recueil.
Mais quel dommage ne pas avoir complété le disque avec l’Opus 119.
LE DISQUE DU JOUR
Johannes Brahms
(1833-1897)
7 Fantasien, Op. 116
3 Intermezzi, Op. 117
6 Klavierstücke, Op. 118
Hortense Cartier-Bresson, piano
Un album du label Aparté AP222
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Photo à la une : la pianiste Hortense Cartier-Bresson, dans sa jeunesse – Photo : © DR