Les Argentins ne sont pourtant pas des Lusitaniens, mais le beau cycle tranquille à force de nostalgie que Carlos Guastavino écrivit en 1969 sur des poèmes de León Benarós est merveilleux de poésie discrète même lorsqu’il s’anime d’un sourire dansant. La délicatesse des traits, la simplicité du chant, tout aussi fausses que celles du piano, cachent l’art par l’art et laissent transparaître avec des finesses subtiles les inspirations populaires.
Une romance toute simple comme La rosa y el sauce semble remonter jusqu’aux chansons séfarades, tout un imaginaire de la très ancienne Espagne s’y infuse (et même avec des éléments du langage de Granados que Guastavino y assimile).
Les poèmes de Rafael Alberti inspirent une dimension narrative supplémentaire qui donne au recueil de 1946 une nostalgie diffuse jusque dans les mélodies les plus brillantes, typique de la veine de jeunesse de Guastavino où l’écriture pianistique est plus alerte, plus savante, où la voix se pare d’ornements qui font penser au style si coloré que Joaquín Rodrigo mettait en œuvre de l’autre côté de l’Atlantique.
L’album est merveilleux jusque dans sa coda amère, la grande plainte d’El sampedrino, portée par la voix toute simple de Letizia Calandra pourtant si fruitée, et par ce piano sans marteau de Marcos Madrigal, timbres souples, couleurs feutrées, pour une petite heure de rêve éveillé.
LE DISQUE DU JOUR
Carlos Guastavino
(1912-2000)
Flores Argentinas
Elegía para un gorrión
Se equivocó la paloma
Jardín de amores
¡a volar!
Nana del niño malo
La novia
Geografía física
¡al puente de la golondrina!
Elegía
El sampedrino
Letizia Calandra, soprano
Marcos Madrigal, piano
Un album du label Brilliant Classics 95798
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Photo à la une : le compositeur Carlos Guastavino – Photo : © DR