Les Symphonies de Tchaikovski auront été galvaudées, les rendre dans leurs textes originaux, en respectant scrupuleusement les nuances dynamiques et les notations expressives du compositeur aura été la grande œuvre de Mariss Jansons. Il fut à bon école, auprès de son père, Arvid, et de son mentor Evgeni Mravinsky. Plus marginalement, Anatole Fistoulari avait apporté sa pierre à ces relectures drastiques. Depuis cet art sévère et fulgurant s’était perdu, Paavo Järvi renoue dans ce disque stupéfiant avec la vérité du texte.
Lecture au cordeau, qui suit la partition à la lettre, respecte les tempos, éclaire l’orchestre par des phrasés et des accents qui en dessinent le moindre repli. Quel art de l’attaque partout, quel sens de l’élan. Hors des Russes, seul Antal Doráti avait réussi a ce point la ténébreuse 5e, surtout dans son enregistrement de Minneapolis. C’est que Tchaikovski déteste l’opulence, les orchestres gras le trahissent en l’alourdissant, lui qui écrit toujours svelte et se souvient de Mozart. Admirable lecture avant même qu’interprétation, mais qui impose la singularité d’une partition souvent trahie.
Francesca da Rimini, le chef-d’œuvre d’orchestre du compositeur pourra développer ses cercles infernaux et ses parenthèse de grâce, et là, Paavo Järvi interprète, fait saillir des personnages, se saisissant de la partition de Tchaikovski à l’aune du poème de Dante, conduisant la Tonhalle de Zürich à se surpasser.
Tout grand disque, amorce d’une intégrale que l’on va suivre avec ardeur.
LE DISQUE DU JOUR
Piotr Illitch Tchaikovski (1840-1893)
Symphonie No. 5 en mi mineur, Op. 64
Francesca da Rimini – Fantaisie pour orchestre, Op. 32
Tonhalle-Orchester Zürich
Paavo Järvi, direction
Un album du label Alpha 659
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Photo à la une : le chef d’orchestre Paavo Järvi, dirigeant l’Orchestre de la Tonhalle de Zürich – Photo : © Alberto Venzago