Comédie et tragédie

Après tout, si je devais garder une seule version de Burleske, œuvre que j’adore, le tandem ArrauDefauw me suffirait. C’est que Claudio Arrau est le seul à faire rire son clavier, y ajoutant une touche méphistophélique. Argerich sait y être prodigieuse, Barry Douglas aura laissé une proposition admirablement détaillée, à l’envers du sérieux un peu aristocratique de Janis, bien d’autres s’y seront cassé les doigts, ou les y auront lassés, Bertrand Chamayou tout récemment.

Surprise, dès ses premiers traits, Nelson Goerner ébroue son clavier, il a le rire et aussi la fantaisie poétique, une dimension lyrique dans les pages de pur charme, et cette électricité capricieuse que Mikko Franck sait exciter. Bravo, je le range aux côtés d’Arrau.

Le disque a d’autres atouts, une merveilleuse lecture de l’agreste Sérénade pour vents, si rarement enregistrée, et surtout une interprétation cursive, sans aucun alourdissement métaphysique, de Mort et Transfiguration, jouée d’un trait, Mikko Franck narrant l’agonie comme l’élévation, en en bannissant tout pathos.

LE DISQUE DU JOUR

Richard Strauss (1864-1949)
Burleske en ré mineur, TrV 145
Sérénade pour instrument à vent en mi bémol majeur,
Op. 7

Tod und Verklärung, Op. 24, TrV 158

Nelson Goerner, piano
Orchestre Philharmonique de Radio France
Mikko Franck, direction

Un album du label Alpha Classics 733
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Photo à la une : le pianiste Nelson Goerner – Photo : © Marco Borggreve