Iván Fischer boucle son cycle Brahms avec la si difficile Troisième. En était-il effrayé pour avoir tant attendu ? Dans une note liminaire, il affirme pourtant son admiration pour les dix mesures qui ouvrent l’œuvre et pour la complexité d’un parcours harmonique qui sera le vrai sujet de son interprétation si fouillée.
Le peu d’ardeur rythmique qu’il met au long de sa lecture pourrait faire un peu vite accroire qu’il y pêcherait par prudence, mais non. Eperdument lyrique, sa Troisième qui parfume ses sfumatos dans un orchestre somptueux, est à revers de tant d’autres, et expose avec une nostalgie sereine les allures de sérénade de l’Andante.
Il la déploie entièrement dans des lumières de crépuscule encore clair, raffinant tout un univers de polyphonies et comme le faisait jadis Herbert von Karajan, tuilant ces successions de vastes mélodies qui parcourent les pupitres de l’orchestre. La balance sonore est inouïe, qui fait tout entendre dans le corps harmonique, et les tempos tous médians – le Poco allegro est emblématique – distille une poésie souvent étrange. Certains regretteront que la tension manque au Finale, mais sa coda si nimbée d’au-delà les consolera peut-être.
Après le crépuscule, le tendre soleil qu’il infuse au long de cette pastorale qu’est la Seconde Sérénade séduira plus immédiatement les revêches ; qu’Iván Fischer et son orchestre soie et brocart nous gravent maintenant la grande Première Sérénade, qui ferait une belle coda à un cycle que le temps aura distendu au point de le rendre quasi invisible.
LE DISQUE DU JOUR
Johannes Brahms
(1833-1897)
Symphonie No. 3 en fa majeur, Op. 90
Sérénade pour orchestre No. 2 en la majeur, Op. 16
Budapest Festival Orchestra
Iván Fischer, direction
Un album du label Channel Classics CCSSA43821
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Photo à la une : le chef d’orchestre Iván Fischer – Photo : © DR