Un chef d’orchestre ? Un peintre ! Mikko Franck gorge son Debussy de couleurs, il n’est pas de ceux qui entendent d’abord chez l’auteur de Jeux les audaces de l’harmonie, d’ailleurs le programme édité ici ne pioche pas de côté-là, il serait plutôt du genre à inviter le Faune jusque dans Nuages, que tant auront aminci, espérant en faire entrer les forts tons d’huile dans les pâleurs du pastel.
Ici, le ciel est aussi sensuel que la terre, et passant, la nuance piano absente : cette saturation des couleurs ne peut s’obtenir que par une saturation des sons eux-mêmes. Fascinant à force de sensualité jusque dans les éclats de Fêtes, et plus encore dans des Sirènes vampiriques où la Maîtrise de Radio France se couvre de gloire, comme au long d’une Damoiselle élue sauvée des langueurs préraphaélites, elle aussi sensuelle, quasi érotique ; les deux solistes n’y sont pas pour peu, ardentes, loin de toute minauderie.
Érotiques, les extases « annunziennes » du Martyre le sont assurément sous cette baguette brûlante, comme seul jadis André Cluytens put les faire entendre, mais il gravait tout, drame compris : et si Mikko Franck, après avoir si bien promis, relevait ce défi-là ?
LE DISQUE DU JOUR
Claude Debussy (1862-1918)
La damoiselle élue
Le martyre de Saint Sébastien – Fragments symphoniques
Nocturnes
Melody Louledjian, soprano
Emanuela Pascu, mezzo-soprano
Maîtrise de Radio France
Orchestre Philharmonique de Radio France
Mikko Franck, direction
Un album du label Alpha Classics 777
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Photo à la une : le chef d’orchestre Mikko Franck – Photo : © Radio France